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graphe relié par un tube de caoutchouc à la plume d’un appareil enregistreur ; ce dernier procédé est moins correct que le précédent, mais il a l’avantage de montrer le fait suivant, qui est extrêmement curieux ; lorsque le sujet serre volontairement avec la main insensible, pour répondre aussi vite que possible à un signal convenu, on voit parfois que, bien qu’on lui ait recommandé de ne serrer qu’une fois seulement, il a donné deux pressions : l’une des pressions correspond au temps moyen de réaction de la main insensible ; l’autre, au contraire, généralement beaucoup moins forte, correspond au temps moyen de réaction de la main sensible ; et la différence entre ces deux moyennes est assez grande pour qu’il soit impossible de les confondre ; de plus, cette seconde pression est involontaire et inconsciente, car le sujet ne croit avoir pressé qu’une fois ; enfin, quand il ne se produit qu’une seule pression, ce qui est le cas le plus fréquent, cette pression unique et volontaire présente toujours le temps moyen de la main anesthésique. Toutes ces raisons nous déterminent à croire que la réaction supplémentaire dont nous venons de parler appartient à la catégorie des mouvements inconscients ; et il en résulte cette conclusion importante que même pour un membre insensible, la durée de la réaction inconsciente est à peu près égale à celle de la réaction consciente pour un membre sensible.

En terminant ce paragraphe, j’insiste encore sur le caractère psychologique des réactions que nous venons d’enregistrer ; ce sont des réactions inconscientes, mais elles n’en émanent pas moins d’une intelligence. Il serait dangereux de l’oublier, et de croire que par cela seul qu’on se sert d’un cylindre enregistreur et d’un papier enfumé, on n’a pas à craindre les causes d’erreurs psychologiques.