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LE CORPS DE L’ENFANT

et examen des organes des sens. Mais peu importe ce détail, qui n’est que secondaire ; ce qu’il faut surtout mettre en relief, c’est l’idée que les médecins se font des services que le carnet sanitaire rendra aux enfants. Pour que ces services ne soient pas purement fictifs, il faudrait que les attributions du médecin scolaire fussent conçues autrement qu’on ne les conçoit actuellement.

Actuellement, on veut en effet que le médecin scolaire, après avoir examiné un enfant malade ou prédisposé, et si cet enfant n’a point une maladie contagieuse, ne prescrive aucune sorte de traitement ; on veut même qu’il ne formule aucun diagnostic, et qu’il se contente de faire signaler aux familles que leur enfant a besoin de soins médicaux, sans ajouter un seul mot. Cette réserve est imposée par le désir de respecter les droits des médecins non scolaires, et de ne pas leur faire une concurrence très sérieuse. Ceux-ci en effet perdraient tous leurs clients si les médecins scolaires les soignaient gratuitement.

Il y a là un bel exemple de fraternité professionnelle, et nous l’admirerions de tout cœur, si la santé des enfants n’en faisait les frais. C’est peut-être cette partie de la question qu’on oublie trop ; et notre avis est que si ce sont les malades qui font vivre le médecin, il n’en résulte pas que les malades soient faits pour le médecin. En restreignant outre mesure l’initiative du médecin scolaire, on rend sa fonction bien peu importante ; quand l’écolier malade ou maladif appartient à un milieu aisé, sa famille, dans la plupart des cas, aura son médecin traitant, et saura déjà à quoi s’en tenir sur la santé de l’écolier ; l’avertissement du médecin scolaire ne lui apprendra rien de très nouveau. Quand au contraire, il s’agit d’un enfant qui appartient à un milieu pauvre, il y a des chances pour que les parents n’aient jamais consulté de médecin ; et il y a des chances