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LES IDÉES MODERNES SUR LES ENFANTS

tient à un type subjectif et qui néanmoins se livre avec succès à la peinture. S’il nous fallait une expérience de plus, pour démontrer la nécessité de la prudence, nous ajouterions la leçon qui nous a été fournie par des recherches toutes récentes sur les peintres. Nous avons fait des études sur un jeune peintre déjà célèbre, bien qu’il n’ait pas vingt ans ; le jeune Tade Styka a une remarquable virtuosité de dessinateur, et on pouvait s’attendre à ce que sa mémoire visuelle se montrât excellente. Nous lui avons fait copier de mémoire nos modèles de lignes, que nous employons dans les écoles pour éprouver la mémoire visuelle, et nous fûmes bien surpris : Tade Styka n’est pas plus habile, pour faire une reproduction exacte, qu’un enfant de huit ans qui ne sait pas dessiner. Lui refuserons-nous du talent, parce qu’il a échoué à un de nos tests ? Et s’il n’avait encore que huit ans, dirions-nous à son père : « Ne le faites pas dessiner, il n’a pas d’aptitudes ? » Évidemment non. L’aptitude au dessin se démontre par le dessin, l’aptitude au chant par le chant, et ainsi de suite ; il n’y a pas d’autre moyen, pas d’autre méthode de démonstration.


IV

aptitude particulière et culture générale.


En terminant l’exposé de ce qu’on sait actuellement sur les aptitudes des enfants, je pense utile d’examiner rapidement une question d’intérêt général, que nous avons négligée dans notre exposé, et qui cependant le domine. C’est la question de l’utilisation qu’il faut faire des aptitudes particulières à un enfant. Deux opinions tout à fait différentes peuvent être soutenues et l’ont été en fait. D’après l’une, il faut toujours donner à n’importe quel enfant une culture