des plus grandes merveilles, un des plus grands mystères de l’activité humaine, est de l’art sans paroles, qui vit avec des sensations, des images et des sentiments. Objectera-t-on que l’intelligence sensorielle appartient surtout aux enfants et aux peuples primitifs, tandis que l’intelligence verbale marque l’apparition de la pensée abstraite, de la science, et appartient à une civilisation avancée ? Peut-être ; la remarque est juste ; mais en quoi constitue-t-elle une dépréciation de l’intelligence sensorielle ? Si les origines de l’intelligence sensorielle sont plus lointaines, plus primitives, on ne peut rien en conclure sur la hauteur où elle peut s’élever ; nous ne devons juger les choses que par leur résultat, leur destinée, et non leur origine. Le roman et surtout la poésie ne supposent-ils pas la survivance partielle, chez le poète, d’une âme d’enfant, avec son impressionnabilité, sa curiosité, son goût pour le mystère et son imagination concrète ? On ne porte nullement ombrage à la poésie, en lui rappelant ses origines. C’est donc une vaine et puérile préoccupation de classer, par ordre de mérite, les aptitudes humaines ; l’essentiel est qu’elles restent nombreuses et d’une infinie variation, parce que le bon fonctionnement d’une société l’exige ; disons aussi qu’il est nécessaire qu’elles soient reconnues pour que chacun s’attelle à la besogne qui lui convient le mieux.
À l’école, au lycée, est-il possible déjà de les déterminer ? Ce n’est pas seulement possible, c’est même facile. Il n’y a qu’à regarder les enfants, les observer, les interroger. Celui qui ne lit que des livres de science, de mécanique, n’est point un littéraire. Celui qui passe ses dimanches à dessiner n’est pas davantage un littéraire. Du reste, les places en composition sont là : elles indiquent clairement les aptitudes des enfants à ceux qui veulent se donner la peine de les étudier de près. On soupçonnera un verbal chez celui qui est fort en grammaire, en calcul, surtout en