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LES IDÉES MODERNES SUR LES ENFANTS

cette notion si simple que l’école ne vaut que comme préparation à la vie, et que d’autre part, pour juger de la valeur de cette préparation, on ne se contente pas d’à peu près ou d’observations accidentelles. Nous sommes étonnés d’avoir à constater qu’il nous manque une étude suivie sur la destinée des écoliers, mise en rapport avec l’enseignement qu’ils ont reçu ; une large statistique, ou, pour mieux dire, une étude sérieuse et approfondie, qui s’appuierait sur des statistiques critiquées, aurait dû être faite depuis longtemps pour nous mettre en mesure de nous rendre compte si l’enseignement que nous donnons est utile, ou s’il ne doit pas être modifié. Généralement, l’œuvre la plus importante est celle à laquelle on pense le moins ; mais il arrive aussi que par la nécessité elle finit par s’imposer à l’attention. On le voit bien en ce moment même ; le besoin de contrôle que nous signalons commence à se faire jour. D’une part, il s’est déclaré dans les milieux primaires ce qu’on appelle « une crise de l’apprentissage », qui met en cause les programmes de l’instruction dans les écoles ; et d’autre part, depuis longtemps, on crée des écoles techniques, des cours, des ateliers, mille moyens divers de donner au jeune apprenti l’enseignement professionnel ; certes, on n’y a pas toujours réussi, il est même arrivé souvent qu’on faisait fausse route, et que des écoles supérieures, entretenues à grands frais, n’ont servi à former que des fonctionnaires, au lieu d’ouvriers ; mais il n’importe ; si le remède n’est pas trouvé, on est devenu conscient du mal, et on a compris que pour juger l’école, il faut regarder dans la vie. De même toutes ces œuvres d’instruction et d’éducation postscolaire, pour lesquelles on a déjà tant dépensé, et qui, elles aussi, ont manqué si souvent leur but, prouvent bien que l’on comprend l’utilité de juger l’enseignement en tant que préparation à la vie réelle. Peu à peu, on abandonnera ces idées généreuses, mais vraiment