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LES IDÉES MODERNES SUR LES ENFANTS

on ne peut pas trouver le repos qui est nécessaire à l’organisation des souvenirs qu’on vient de fixer, il faut tout au moins prendre une précaution, ne pas se livrer à un travail analogue à celui qui vient de nous occuper ; quand on veut apprendre par cœur un morceau de musique, on compromettrait l’œuvre de la mémoire si aussitôt après on se mettait à lire ou à chanter d’autres airs de musique. Des expériences nombreuses de Cohn, Bourdon, Münsterberg, Bigham, mettent ces effets hors de doute, et V. Henri, qui rapporte en détail ces recherches de laboratoire[1], y ajoute une remarque bien intéressante. Si nous nous rappelons mieux le matin une leçon apprise la veille au soir que si nous l’avions apprise le matin et cherchions à la réciter le soir, c’est parce que dans le premier cas nous nous sommes reposés pendant l’intervalle, tandis que dans le second cas l’intervalle a été rempli par un grand nombre d’impressions, qui ont nui au travail d’organisation des souvenirs.


4o Les deux procédés principaux de mémorisation : l’attention et répétition. Voilà pour les conditions toutes extérieures de la mémorisation ; nous venons de voir quand il faut chercher à apprendre et pendant combien de temps. Mais nous n’avons pas encore étudié de près l’acte d’apprendre ; et il faut voir quelle est la meilleure méthode à suivre pour l’exécution de cet acte. Nous pouvons utiliser deux procédés, l’attention et la répétition. Je puis concentrer ma pensée sur le livre, boucher mes oreilles aux bruits extérieurs, en prenant l’attitude bien connue de l’écolier qui apprend sa leçon ; je puis aussi user de la répétition, en me récitant les vers plusieurs fois tout bas, parce que je sais d’instinct que c’est à coups de répétition que le souvenir pénètre dans l’esprit.

  1. V. Henri. Éducation de la mémoire, Année Psychologique, 1902, VIII, p. 40.