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LA MÉMOIRE

même temps je désire économiser mon travail, et dépenser le moins d’efforts possible pour le plus grand résultat. Voyons donc quelle méthode je vais avoir à suivre dans ce cas particulier, que nous choisissons parce qu’il ressemble à une leçon essentiellement scolaire. Tout en décrivant la méthode, nous chercherons à en découvrir la raison et le sens, afin d’arriver à une vue aussi profonde que possible de toute la question, de ses exceptions autant que de ses règles.


1o Le meilleur moment pour apprendre. Commençons par l’heure de l’étude. À quel moment de la journée vais-je me mettre à apprendre le morceau ? Ce moment n’est point indifférent, car un acte de mémoire n’est pas un acte qui se termine et se consomme sur l’heure ; il doit avoir un lendemain ; le souvenir une fois fixé, rien n’est fait si ce souvenir ne se conserve pas. Or, cette conservation, qui suppose la création d’une certaine structure nerveuse, exige des circonstances physiologiques favorables, une bonne circulation et une bonne nutrition. Si je suis fatigué, énervé, troublé ou préoccupé, je pourrai bien écrire une lettre, faire une addition, régler un compte, ou m’occuper à quelque travail machinal, mais je me garderai de chercher à apprendre ; car à ce moment-là je me fatiguerais et j’apprendrais mal. Quand on est fatigué, on peut chercher à se distraire par une lecture amusante ; mais on ne lira pas un livre sérieux, on ne profiterait pas de la lecture. Aussi les candidats qui préparent un examen dans un état de surmenage gardent peu de souvenirs de ce qu’ils ont appris dans cette période. Le surmenage n’est pas la seule raison de leurs oublis, mais elle est une des raisons principales ; une autre raison, c’est, comme nous l’expliquerons un peu plus loin, qu’ils apprennent trop vite et trop superficiellement. On cite à ce propos une preuve amusante : une personne qui est dans un état