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BUT DE CE LIVRE

mande tant, on n’obtiendra rien. Un enseignement public ne peut être que collectif, donné par un maître à plusieurs élèves à la fois : collectif, c’est le contraire d’individuel c’est du vêtement tout fait, et non du vêtement sur mesure. L’enseignement collectif ne doit pas être rejeté complètement, il a des avantages nombreux, dont on ne peut pas se passer, car sans lui, il n’y a ni imitation, ni émulation, ni esprit de corps, ces excitants si puissants du progrès. Nous préférons quelques solutions moins radicales, parmi lesquelles nous recommandons les suivantes. On pourrait, dans les écoles nombreuses, où la loi impose l’organisation de classes parallèles, étudier une répartition des élèves dans ces classes selon leurs aptitudes ; dans certaines on ferait plus de littérature, dans d’autres plus de sciences, dans d’autres plus de pratique et plus de travail d’atelier. Nous ne donnons que des exemples, mais ces exemples, bien entendu, devraient être profondément étudiés. C’est bien là du reste ce qui a été réalisé dans notre enseignement secondaire par le régime des cycles. On pourrait en essayer l’introduction dans l’enseignement primaire. On pourrait veiller à ce que la répartition des élèves dans ces classes ne se fît pas au hasard, c’est-à-dire uniquement selon le désir souvent bien aveugle des familles et des élèves. Sans entreprendre contre la volonté de personne, je crois qu’un maître averti serait capable de donner des conseils utiles, surtout s’il prenait la peine d’étudier de près les qualités d’un enfant. En effet, mon opinion murement réfléchie est que nous n’avons pas tellement besoin d’une nouvelle réglementation ministérielle : ce qui est infiniment plus utile, c’est que les maîtres de tous ordres ne continuent pas à rester dans une ignorance systématique de ces questions de psychologie individuelle, c’est qu’ils ne s’en méfient pas, c’est qu’ils s’y intéressent, et surtout qu’ils les pra-