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LES IDÉES MODERNES SUR LES ENFANTS

rapidement des ignorants, vous ne démontrez pas que leur intelligence ait augmenté ». Pardon. Ce ne sont pas seulement des ignorants tous avaient une tare mentale, faiblesse d’attention, faiblesse de compréhension ou autre insuffisance et c’était cette tare qui les empêchait de profiter de l’enseignement donné dans les classes ordinaires et par les méthodes ordinaires. Maintenant, cette instruction est assimilée ; voilà le fait ; des habitudes de travail, d’attention, d’effort sont prises ; c’est encore un fait, et ce second fait est même plus important que le premier. Quelle est la part exacte de l’instruction et celle de l’intelligence dans ce résultat acquis ? Il serait extrêmement difficile de le savoir, et peut-être inutile de le chercher, car le rendement de l’individu, son utilité sociale, sa valeur marchande dépendent à la fois de ces deux facteurs. L’esprit de ces enfants est comme un champ pour lequel un agronome avisé a changé le mode de culture ; résultat au lieu de friches, nous avons maintenant une récolte. C’est dans ce sens pratique, le seul accessible pour nous, que nous disons que l’intelligence de ces enfants a pu être augmentée. On a augmenté ce qui constitue l’intelligence d’un écolier, la capacité d’apprendre et de s’assimiler l’instruction.

Devant ce résultat si encourageant, nous sentons grandir nos espérances et nos ambitions. Nous sommes heureux de nous être si longtemps occupé des anormaux. Si avec tant de gens de bonne volonté nous nous sommes intéressés à ces malheureux, c’est d’abord par un sentiment de pitié, c’est aussi par un sentiment de défense sociale, pour chercher à diminuer le nombre de ceux qui plus tard seront des inutiles et pourront devenir des nuisibles ; mais c’est surtout parce que nous avons le ferme espoir que l’étude des anormaux servira aux normaux, de même que nous voyons dans un autre