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de la suggestion que sur des sujets préalablement hypnotisés, ou bien, si l’on essayait de faire de la suggestion à l’état de veille, c’était exactement par les mêmes procédés que ceux de l’hypnotisme, c’est-à-dire par des affirmations autoritaires amenant une obéissance automatique du sujet et suspendant sa volonté et son sens critique.

Les méthodes nouvelles que je vais décrire n’ont, je crois, aucun rapport pratique avec l’hypnotisme ; ce sont essentiellement des méthodes pédagogiques : et j’ai pu les employer pendant plusieurs mois de suite dans les écoles, sous l’œil attentif des maîtres, sans éveiller chez eux la moindre crainte que leurs élèves fussent l’objet de manœuvres d’hypnotisation ; c’est qu’en effet ces méthodes ne provoquent pas plus d’émotion ou de trouble chez les sujets qu’un exercice de dictée ou de calcul. Je dirai plus : ces expériences peuvent rendre de grands services aux élèves, si on a le soin de leur expliquer, quand le résultat est atteint, quel est le but qu’on se proposait, si on leur met sous les yeux l’erreur qu’ils ont commise, si on leur indique pourquoi ils ont commis cette erreur, comment ils ont manqué d’attention ; c’est une leçon de choses, et en même temps une leçon morale dont l’enfant profite souvent, j’en ai eu la preuve, car j’en ai vu plusieurs qui, à chaque épreuve, apprenaient à se corriger et devenaient moins suggestibles.

Certes, ce n’est pas seulement aux enfants que cette leçon serait salutaire, mais surtout aux adultes, qui trop souvent, comme on l’a vu dans ces derniers temps, perdent l’habitude d’exercer leur sens critique, de se faire une opinion personnelle et raisonnée, et se laissent servilement suggestionner par les polémiques de presse !