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INTRODUCTION

et transposant plusieurs passages, surtout dans la dernière partie.

En 1597, lorsque J. Galland publia une nouvelle édition des Œuvres de P. de Ronsard chez la veuve de G. Buon, la Vie de Ronsard y reparut, à la même place, c’est-à-dire dans le 5e volume, au tome X et dernier, après les Derniers vers[1]. Même format, mêmes caractères d’imprimerie qu’en 1587 ; mais cette fois la Vie de Ronsard occupait les pages 109 à 179 ; elle avait vingt pages de plus qu’à la deuxième rédaction. — Binet avait été « pourvu gratuitement de la charge de Lieutenant général de la Sénéchaussée de Riom par la reine Elisabeth douairière de Charles IX »[2] ; son compatriote et ami Antoine Loisel, auquel on doit ce renseignement, ne dit pas à quelle date ; ce fut probablement en 1587, car Binet ne porte ce titre dans aucun des documents qui font mention de lui avant cette année-là, et d’autre part on le trouve, prenant la parole en cette qualité, aux États de Blois dans la deuxième moitié de 1588[3]. Il semble avoir dès lors abandonné le « culte des Muses », que ne favorisaient guère les troubles de la Ligue, et s’être consacré presque entièrement à sa fonction de président de tribunal, difficile en ce temps d’anarchie. Mais il resta fidèle au culte de Ronsard, la preuve en est dans la troisième rédaction de sa biographie, à laquelle il se remit dès avant l’assassinat de Henri III (1er  août 1589), comme on peut le conjecturer d’après deux passages[4], et à laquelle il travaillait encore, un autre passage en témoigne, après le sacre de Henri IV (février 1594)[5]. Il apporta tous ses soins à embellir cette chapelle qu’il avait élevée sur la tombe du poète. Il laissa chaque chose à sa place ; mais il répandit de-ci de-là des grains d’encens et des fleurs ; il recueillit de nouvelles anecdotes et arrangea les anciennes à l’honneur de son héros ; il augmenta le nombre des citations, ajouta des détails de nature à justifier l’homme, à grandir l’écrivain, à défendre sa mémoire à la fois contre les haines religieuses et les critiques littéraires ; il écrivit enfin un préambule moral à la Tacite, digne entrée du pieux monument.

En somme, Binet s’est trouvé dans des conditions relativement favorables à la composition d’une bonne biographie de Ronsard. Il est vrai qu’il y avait entre eux une grande différence d’âge (environ 28 ans), et que Binet ne paraît pas avoir songé à cette biographie avant la mort de Ronsard. Mais ayant été reçu dans la familiarité du poète trois ou quatre

  1. D’ailleurs la fin du volume se présente d’une façon différente. Après la Vie de Ronsard viennent les cinq distiques latins de J. Galland Piis amici Ronsardi manibus, l’Oraison funebre sur la mort de M. de Ronsard par Du Perron, l’Eclogue de Binet et le Tombeau.

    Nous ne parlons pas de l’édition lyonnaise de Th. Soubron de 1592. parce qu’elle reproduit intégralement le texte de 1587 en ce qui concerne la Vie de Ronsard, et qu’elle se fit à l’insu de Galland et de Binet.

  2. Ant. Loisel, Memoires de Beauvais et du Beauvaisis, p. 221 ; cité par La Monnoye en note de l’article Claude Binet dans la Bibliotheque de La Croix du Maine.
  3. Harangue pour les Estats (par C. Binet, lieutenant général d’Auvergne), 1588, in-8o de 14 pp. (Bibl. Nat., Lb34, 531).
  4. Voir ci-après, mon Commentaire, pp. 174 et 231, aux mots « regnant » et « devins ».
  5. Ibid., p. 48. ligne 17.