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ET CRITIQUE

Ex epistola P. Ronsardi ad J. Ant. Baïfium. Dii boni, quem mihi librum misisti a nostro Sammarthano conscriptum ! Non liber est, sunt ipsae Musae : totum nostrum Helicona testem appello. Quin et si de eo judicium mihi concessum sit, velim equidem illum omnibus hujus seculi poëtis anteponere : vel si Bembus, Naugerius, divinusque Fracastorius aegre laturi sint. Dum enim perpendo quàm aptè suavitatem carminis purae tersaeque dictioni, fabulam historiae, philosophiam arti medicae conjunxerit, libet exclamare — deus, deus ille Menalca, seculumque istud felix dicere, quod nobis talem, tantumque virum protulerit.

Ainsi Binet n’a pas été le premier à publier le jugement de Ronsard sur la Paedotrophia. Bien mieux, il semble que, après avoir reproduit en 1587 certaine tournure elliptique et obscure de l’original communiqué par Baïf, il ait eu recours en 1597 au latin élégant de Sainte-Marthe pour éclairer et arrondir la dernière partie de sa citation.

P. 45, l. 1. — fonteine Bellerie. Ce n’est pas un nom de fantaisie. D’après un acte notarié du 11 mai 1765, Robert Lorin, prêtre, « baille à ferme une piece de terre tant en nature de pré ou noüe fauchable que chenevril enclos de hayes vives en dependantes situées au lieu de la Bellerie, paroisse de Couture, pres ledit lieu des Pastils (autrement nommé le Vauméan), pres le chemin qui conduit de Couture aux Essarts. » Dans un autre acte du 24 mai 1777, il est question de la Maugarierie proche de la Bellerie (Archives dép. du Loir-et-Cher). — Le cadastre de la commune de Couture mentionne aussi la terre de la Bellerie. Mais les habitants de cette commune disent par corruption la ferme de la Belle Iris, croyant à une vague tradition locale d’après laquelle Ronsard aurait fréquenté ce lieu avec l’une de ses maîtresses (peut-être faut-il voir l’origine de cette tradition dans l’ode Je veux, Muses aux beaux yeux, où le poète dépeint Cassandre dormant nue au bord de la fontaine Bellerie).

Quant à la « fontaine » même, elle jaillissait d’un antre creusé dans le tuf, que l’on aperçoit encore au fond de la cour de la dite ferme, située à trois ou quatre cents mètres à l’est du manoir de la Possonnière. Elle existe toujours, mais elle est captée et a perdu tout son charme. On voit seulement à l’entrée de la ferme un déversoir de la source, entouré de peupliers, d’où elle fuyait vers le Loir, à la limite orientale des Fiefs Communs. Avant un éboulement de tuf survenu en 1870, elle formait encore au seuil même de son antre une nappe d’eau courante qui servait de lavoir aux gens du Vauméan, et de rendez-vous l’été pour les veillons (veillées ; cf. réveillon). — On ne doit pas la confondre avec une autre source, dite du Haut-Vauméan, située au delà de ce hameau, à droite de la route de Couture aux Essarts, captée aussi, mais à ciel ouvert, et bordée d’acacias, au demeurant presque tarie.

On voit ce qu’il faut penser de l’assertion de l’abbé Simon, d’après lequel la fontaine Bellerie aurait été dédiée à Belleau par Ronsard et aurait pris son nom de lui (Hist. de Vendôme, III, 533) ; c’est une opinion d’autant plus fausse qu’en 1550 Ronsard ne connaissait pas encore Belleau et que cependant il fit alors paraître deux odes A la fontaine Bellerie ; je ne l’aurais même pas relevée, si elle n’avait pas reparu