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ET CRITIQUE

Cet opuscule très rare n’ayant jamais été réimprimé, et les vers que Binet cite n’ayant jamais paru que là sous cette forme, il faut que Binet l’ait consulté, et cela dès sa première rédaction.

P. 17, l. 26. — de Melin. C’est bien en effet le texte de la fin de l’hymne triumphal tel qu’il parut dans le Tombeau de Marguerite de Valois en mars 1551. Binet y a lu, au mot Melin, cette note de Nicolas Denisot, qui lui a permis de donner ici quelque précision à son exposé : « Il entent Melin de Sainct Gelais, qui trop envieusement blâma ses œuvres devant le Roy ».

P. 18, l. 1. — ces vers. Ronsard les changea en ceux-ci dès la 2e édition de son Hymne triumphal, dans le Cinquiesme livre des Odes (septembre-octobre 1552) :

Preserve moi d’infamie
De toute langue ennemie
Teinte en venin odieux,
Et fay que devant mon Prince
Desormais plus ne me pince
Le caquet des envieux.


Ce nouveau texte fut conservé dans toutes les éditions postérieures. D’après l’édition Blanchemain (II, 326), qui prétend donner le texte des Odes d’après la première édition collective de 1560, on pourrait croire que le texte de 1551 existait encore en 1560, et Mlle Evers l’a cru (op. cit., pp. 160, 162, 183), après L. Froger (Prem. poés. de R., p. 27, note). Il n’en est rien : Ronsard une fois réconcilié avec Saint-Gelais le fut bel et bien, et, après la mort de son ancien adversaire (oct. 1558), il n’eut pas l’indélicatesse de reprendre son premier texte.

L’addition de C fait allusion non seulement à l’ode de 1553 A M. de Saint-Gelais (Bl., II, 278), mais encore à l’Hymne des Astres, de 1555 (Id., V, 275), qui ne fut supprimé qu’en 1584 parce qu’il faisait double emploi avec l’Hymne des Estoilles ; à l’Hymne du Roi Henry II, de 1555 (Id., V, 74) ; au poème A tres illustre prince Charles Cardinal de Lorraine, composé en 1561-62 (trois ans après la mort de Saint-Gelais), qui contient ce bel éloge :

Sainct Gelais qui estoit l’ornement de nostre âge,
Qui premier des François nous enseigna l’usage
De sçavoir chatouiller les oreilles des Rois
Par sa lyre accordante aux douceurs de la vois,
Qui au Ciel egaloit sa divine harmonie,
Vit (malheureux mestier !) une tourbe infinie
De poltrons avancez, et peu luy profitoit
Son luth, qui le premier des mieux appris estoit.
(Texte de 1584, M.-L., III, 274. Cf. Bl., III, 355.)


C’est à ce dernier vers que Binet a emprunté l’éloge de Saint-Gelais qu’il met dans la bouche de Ronsard en C.

P. 18, l. 8. — nouveauté. Cf. la dédicace du Commentaire des Amours par Muret : « L’un le reprenoit de se trop louer, l’autre d’escrire trop obscurément, l’autre d’estre trop audacieux à faire nouveaux mots… » (Edition de Ronsard par Marty-Lav., I, 374.)

P. 18, l. 9. — en risée. Cf. ce passage ironique du Quintil Horatian :