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ET CRITIQUE

P. 6, l. 27. — une Diete. Source, la suite de l’autobiographie :

D’Escosse retourné je fus mis hors de page
Et à peine seize ans avoient borné mon âge
Que l’an cinq cens quarante avec Baïf je vins
En la haute Allemaigne, où la langue j’apprins.


Antoine de Baïf, fils de celui dont il s’agit ici, a écrit de son côté dans la dédicace de ses œuvres Au Roy (en 1572) :

En l’an que l’Empereur Charle fit son entrée
Receu dedans Paris, l’année desastrée
Que Budé trepassa, mon pere qui alors
Aloit ambassadeur pour vostre ayeul, dehors
Du royaume en Almagne, et menoit au voyage
Charle Etiene, et Ronsard qui sortait hors de page
(Etiene medecin, qui bienparlant étoit,
Ronsard de qui la fleur un beau fruit promettoit).
Mon pere entre les mains du bon Tusan me lesse...
(édition Marty-Lav., I, v.)


Binet, en voulant préciser, a commis une erreur que tous les biographes ont répétée. Ce n’est pas à Spire dans le Palatinat, mais à Haguenau en Basse-Alsace, que se tinrent les réunions auxquelles prit part Lazare de Baïf, et ce ne fut pas une diète, mais un simple convent, qui devait régler à l’amiable certaines questions religieuses. On peut penser qu’il a confondu avec la Diète de Spire qui eut lieu onze ans auparavant (1529). Son erreur peut venir aussi de ce fait que Charles-Quint invita d’abord (le 18 avril 1540) les membres de la conférence à se rassembler à Spire, puis changea d’avis au commencement de mai, cette ville étant alors décimée par la peste (cf. Janssen, L’Allemagne et la Réforme, trad., III, 473). Il a pu enfin se fonder sur ces lignes de J. Velliard, op. cit., f° 5 v° : « Anno enim milesimo quingentesimo quadragesimo honoris caussa, privato oflicio a patre missus est cum Lazaro Baiffio, qui tum regis legatus Nemetes totamque Germaniam obibat », les Némètes, peuplade que mentionnent César et Tacite, correspondant à peu près à la région de Spire.

Sur la durée de cette ambassade (du 16 mai au 14 août 1540), sur les personnages qui prirent part aux conférences et le profit que Ronsard a pu en tirer, v. Lucien Pinvert, Lazare de Baïf, éd. française, pp. 69-77, et ma Jeunesse de Ronsard, janvier 1902, pp. 46 et suiv.

P. 6, l. 42. — depuis Roy. Binet pour sa rédaction de B s’est appuyé sur ce passage du Tombeau de Marguerite de France :

Les roses et les lis en tous temps puissent naistre
Sur ce Charles qui fut pres de cinq ans mon maistre.


Il s’est d’ailleurs très mal exprimé. Sa phrase est tournée de telle façon que ces cinq ans semblent antérieurs à 1540, ce qui serait tout à fait contraire aux faits. Aussi a-t-il ajouté en C « et jusques à son decez ». Mais comme ce décès eut lieu le 8 septembre 1545, si Ronsard était resté au service du prince Charles jusqu’à cette date, cela ferait bien plus de cinq ans.