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COMMENTAIRE HISTORIQUE

promis par Paschal à Ronsard, et que pour la circonstance le poète avait très probablement enjolivé la vérité. Aussi a-t-il accepté sans critique les renseignements qu’elle contient.

C’est en 1560 que Ronsard remplaça Paschal par Belleau dans l’adresse de cette autobiographie, mais elle figurait alors au premier livre des Poëmes, n° XX, sans porter le nom particulier d’élégie. En 1567, 1571 et 1573, où les Elegies forment avec les Eclogues une section à part divisée en plusieurs livres, elle est classée la quatrième élégie du livre IV. En 1578, où les Elegies forment pour la première fois avec quelques Discours une série continue, elle a le n° XXIX des Elégies. C’est en 1584 seulement qu’elle est l’Elegie XVI. Nous en concluons que Binet pour sa première rédaction s’est servi de la dernière édition collective publiée du vivant de Ronsard, l’in-folio de 1584. — Pour les rédactions de 1587 et de 1597, il s’est servi de la première édition posthume, à laquelle il avait collaboré, et où l’autobiographie adressée à Belleau n’est plus l’Elégie XVI, mais l’Elégie XXI.

Voici les vers qui ont passé dans la prose de Binet :

Du costé maternel j’ay tiré mon lignage
De ceux de la Trimouille, et de ceux du Bouchage,
Et de ceux des Roüaux, et de ceux des Chaudriers
Qui furent en leurs temps si glorieux guerriers,
Que leur noble vertu que Mars rend éternelle
Reprint sur les Anglois les murs de la Rochelle,
Où l’un fut si vaillant qu’encores aujourd’huy
Une rue à son los porte le nom de luy.
(Texte de 1584. Cf. éd. M-L., IV, 96.)

Sur les alliances contractées par les ancêtres paternels de Ronsard, notamment par son père, et sur les armoiries sculptées et peintes au manoir de la Possonniere qui en témoignent, voir Rochambeau, op. cit., chap. i et ii ; Froger, Nouv. Rech., passim et Tableau généalog. ; surtout Hallopeau, articles des Ann. Fléch. de 1905, tome V, pp. 1, 90, 189, articles recueillis dans son ouvrage sur le Bas-Vendômois en 1906, pp. 74 à 92 et planche de la p. 176, dont nous détachons seulement ces lignes de conclusion : « De l’étude de ces armoiries résulte un fait incontestable : c’est l’orgueil inouï des seigneurs de la Possonniere, qui, avides d’alliances avec les plus illustres familles, n’hésitent pas à s’attribuer des parentés fort discutables. Vers 1515, Loys fait sculpter sur sa cheminée les armes de Jeanne de Vendosmois, par lesquelles les Ronsart prétendaient tenir à la maison de Bourbon et aux anciens comtes de Vendôme ; il cherche encore à se rattacher aux barons de Maillé et peut-être aussi aux barons de Craon. »

Le poète en particulier était très fier de ses ascendants et de leurs attaches plus ou moins directes avec les plus nobles familles : ce sentiment éclate non seulement dans l’Elegie à P. Paschal, mais dans l’ode pindarique A J. du Bellay (épode IV) et dans l’ode Au fleuve du Loir (av. dern. stro.) ; le caractère aristocratique de sa Muse vient en partie de là. Voir ma Jeunesse de Ronsard, où j’ai le premier signalé l’existence des armes de sa mère Jeanne Chaudrier, au manoir de la Possonnière. (Rev. de la Renaiss., févr. 1901, pp. 105-106.)