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etc. J’ai évité de faire faire ces descriptions le même jour, de crainte qu’elles ne subissent l’influence d’une orientation d’idées accidentelle. La première description, celle de la gravure, a été faite le 15 octobre 1900 ; la dernière a été faite en août 1902. Chaque sujet était bien isolé quand il décrivait, et je le laissais en tête à tête avec son papier ; recommandation lui était faite de ne parler de l’expérience à personne et même chacun ignorait le temps que l’autre avait mis à faire sa description. Plusieurs fois, mes sujets m’ont demandé des renseignements sur la manière dont il fallait décrire l’objet, mais je n’ai jamais voulu répondre à leurs questions. Marguerite était souvent embarrassée et elle le disait ; elle était mécontente de son travail, et une fois elle a demandé la permission de le recommencer. Armande était d’ordinaire plus satisfaite ; elle a cependant exprimé une fois quelque incertitude, se demandant si elle devait décrire l’objet tel qu’il était ou bien écrire une histoire à propos de cet objet.

Le caractère le plus frappant des descriptions, c’est qu’elles appartiennent à deux types très différents. Les descriptions de Marguerite sont des descriptions proprement dites, riches en détail sur l’objet qu’on lui mettait devant les yeux. Au contraire, dans les descriptions d’Armande, les détails matériels sont beaucoup moins nombreux, et il y a plus de fantaisie, d’imagination. Cette différence ne s’est pas manifestée dès la première épreuve ; cette première épreuve consistait à décrire une gravure dont je donne ci-joint la reproduction[1]. Les deux sœurs ont donné, de cette gravure, des descriptions que je considère comme équivalentes ; les objets matériels représentés dans la gravure sont décrits et sobrement interprétés. Voici ces deux descriptions.

  1. Ce cliché nous a été obligeamment prêté par la maison Hachette.