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LE MAGNÉTISME ANIMAL

culté de médecine, Deslon, premier médecin du comte d’Artois, élèves et clients affluèrent. Le moment paraissait favorable ; des découvertes récentes avaient remué les esprits et ouvert à la science des horizons nouveaux. Franklin avait inventé les paratonnerres, les frères Montgolfier inventaient les aérostats. Il y a des découvertes scientifiques qui ramènent le peuple à la superstition, en rendant le merveilleux vraisemblable.

Tout le monde voulut se faire magnétiser : l’affluence devint telle, que Mesmer prit un valet toucheur pour magnétiser à sa place. Ce ne fut pas assez ; il inventa le fameux baquet, autour duquel plus de trente personnes se faisaient magnétiser simultanément. Au milieu d’une grande salle, dans laquelle d’épais rideaux ne laissent pénétrer qu’une lumière douce et voilée, se trouve une caisse circulaire en bois de chêne, élevée d’un pied environ ; c’est le baquet. Au fond de la caisse, sur une couche de verre pilé et de limaille de fer, reposent des bouteilles remplies et rangées symétriquement, de telle sorte que tous les goulots convergent vers le centre ; d autres bouteilles sont disposées en sens inverse et rayonnent vers la circonférence. L’eau baigne tous ces objets ; mais le liquide n’est pas indispensable, le baquet peut être à sec. Le couvercle est percé d’un certain nombre de trous d’au sortent des branches de fer coudées et mobiles, que les malades doivent saisir. Le silence est complet. Les malades forment plusieurs rangs autour du baquet, s’unissant entre eux par des cordes passées autour de leur corps, ou par une seconde chaîne qu’ils forment en joignant leurs mains. Puis on attend. Tout à coup, un air mélodieux se fait entendre ; c’est un piano-forte ou un harmonica placé dans la pièce voisine, une voix humaine s’y joint quelquefois. Alors, sous l’influence des effluves magnétiques qui s’échappent du baquet, on voit se produire de curieux phénomènes. Ils ont été fort bien décrits par Bailly, témoin oculaire : « Quelques malades sont calmes et n’éprouvent rien ; d’autres toussent, crachent, sentent quelque légère douleur, une chaleur locale ou une chaleur universelle et ont des sueurs ; d’autres sont agités et tourmentés par des convulsions. Les convulsions sont extraordinaires par leur nombre, par leur durée, par leur force. On en a vu durer plus de trois heures. Elles sont caractérisées par les mouvements involontaires, précipités, de tous les membres, du corps entier, par le resserrement de la