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ils mériteraient qu’on leur consacrât une solide monographie. M. Stein, nous croyons le savoir, prépare, depuis longtemps, une histoire du Téméraire. Souhaitons qu’à François de Bretagne un de nos jeunes confrères, M. Pocquet du Haut-Jussé, par exemple, donne tous ses soins. Car François fut l’âme de cette ligue du Bien-Public, que nul n’avait encore étudiée aussi sérieusement que M. Stein. Cette partie est une des meilleures de son livre. La campagne de Berry et les sièges de Dun-le-Roy et de Bois-l’Abbé ; la mobilisation bretonne ; l’attitude de la Normandie en face des deux partis, telles sont, ce nous semble, les pages les plus neuves que nous devions à l’auteur.

Il nous présente, en outre, les trois apanages successifs de Charles de France : Berry, Normandie, Guyenne ; et il étudie les projets caressés de donner au prince la Champagne, le Dauphiné, le Roussillon. Peut-être l’auteur aurait-il dû expliquer que le grand intérêt de la Normandie était de jeter un pont entre la Bretagne, de François II, et la Picardie et l’Artois, appartenant au duc de Bourgogne. De même, le grand intérêt de la Champagne aurait été de relier les deux parties, septentrionale et méridionale, des possessions du Téméraire. Il n’est pas inutile, peut-être, de le dire.

Ce que fut la politique de Charles de France en Guyenne nous semble bien exposé et nous comprenons, pour la première fois, comment il sut, en somme, s’y rendre populaire. Les institutions de l’apanage nous paraissent, cependant, trop légèrement traitées. Il s’agissait de préciser jusqu’à quel point, en cédant cet apanage à son frère, le roi y réservait encore ses droits souverains. Or, les deux pièces justificatives LXX et LXXIII auraient pu, entre autres documents, permettre de répondre : Louis XI se gardait le droit de confirmer les officiers nommés par l’apanagiste ; à cet apanagiste, il n’abandonnait que temporairement le profit des tailles et des aides. Et puis comment croire avec M. Stein, p. 337, que la cour des Grands-Jours, instituée à Bordeaux, était souveraine, c’est-à-dire dispensée de ressortir en Parlement ? L’édit de création de ces Grands-Jours, p. 702, ne dit-il pas, en propres termes (24 juillet 1469), ce que voici : « Charles, fils et frère de roys de France, duc de Guienne… Comme, puis nagaires, monseigneur le Roy nous ait baillé et livré, pour nostre appanaige, le duché de Guienne…, réservé à luy seulement son hommaige et derrier ressort de noz Grands Jours… » — Bien plus, p. 717-718 (pièce justificative LXXXV, 23 février 1470), nous lisons ces lignes : « C’est le bon advis, oppinion et délibéracion que font messieurs des trois Estas des duché et païs de Guienne… à Mgr duc de Guienne… 7o que son bon plaisir et vouloir soit de modérer les amendes des faulx appeaulx, dévoluz à ses Grands Jours, attendu que, après la discussion faicte esditz Grans Jours, l’en peult encore en appeller en la court de Parlement, à Paris. »

On voit, par là, l’utilité de pièces justificatives comme celles qu’a