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l’année 965. Les manuscrits 5354 et 9708 de la Bibliothèque nationale et le manuscrit 6332 du Vatican présentent la même particularité, avec un peu moins de régularité et d’exactitude. Plus d’une fois les scribes n’ont pas compris le sens de ces lettres et les ont omises ou mal interprétées. Si on cherche le point de départ de cette numérotation, qu’il y a tout lieu de croire chronologique, on arrive à l’année 893, c’est-à-dire à l’avènement de Charles le Simple.

Que faut-il, par suite, conclure ? « Quel pouvait être le but de cette numérotation ? »

Pertz y a vu un de ces synchronismes si fréquents dans les annales et les chroniques du moyen âge. C’est simplement, d’après lui, le compte des années écoulées depuis l’avènement de Charles le Simple[1]. Il n’en fait pas, d’ailleurs, autrement cas et ne s’y arrête pas plus longuement.

M. Lauer a été, au contraire, vivement intéressé par ces nombres. Il les a, comme nous l’avons dit, recherchés dans quelques manuscrits, et il semble bien résulter des intéressantes constatations qu’il a faites que ces lettres se trouvaient dans le manuscrit original et devaient par suite provenir de Flodoard lui-même.

De plus, leur signification ne lui paraît pas douteuse. « Il est difficile, dit-il, de leur en reconnaître d’autre que celle de marquer la suite des paragraphes correspondant aux années[2]. » L’opinion de Pertz lui paraît si peu acceptable qu’il ne la mentionne même pas[3]. Il signale bien, en note, cette circonstance singulière que le point de départ de cette numérotation « correspond aux années de la vie de Flodoard, » mais il considère cette coïncidence comme fortuite et sans conséquence. « Il serait bien étrange, dit-il, que Flodoard ait eu l’idée de mettre son âge à côté de chaque année de l’Incarnation[4] » Donc, ces

  1. « Annus quisque littera græca, numerum quo ab anno 893, initio regni Caroli Simplicis, distet, significante, insignitur. » Migne, CXXXV, col. 422. — M. Lauer se trompe donc lorsqu’il dit (p. 249, n. 5) que Pertz signale brièvement cette numérotation « sans essayer de l’expliquer. »
  2. Lauer, p. 250.
  3. Peut-être M. Lauer passe-t-il sous silence l’opinion de Pertz, simplement parce que cette opinion lui a échappé. C’est ce qui semble résulter du passage cité ci-dessus.
  4. Lauer, p. 251, note. On est renseigné sur la date de la naissance de Flodoard, par son propre témoignage. Il se dit, en effet, en 963, dans la 70e année de son âge. Cf. Annales, éd. Migne, col. 487.