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injustice s’il eût été prolongé. M. Héron de Villefosse, président de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, l’a rompu le premier, au nom des plus éminents confrères de Léon Gautier, en prononçant devant eux le discours qu’on va lire.


H.-F. D.


« Messieurs,

« La mort, cette année, n’épargne pas notre Académie ; elle nous impose de tristes et douloureux devoirs. Á peine avons-nous rendu les derniers hommages à notre confrère Edmond Le Blant, qu’un autre est frappé. Léon Gautier, que nous venons de perdre d’une manière si rapide, était encore assez jeune pour que nous eussions le droit de compter sur son activité ; il nous a été enlevé en quelques heures, sans que ses plus chers amis aient pu lui donner un témoignage de leur affection, sans qu’ils aient pu lui dire un dernier adieu. Lorsqu’il a senti le moment suprême approcher, il a demandé avec instance qu’aucun discours ne fût prononcé sur sa tombe ; votre Président s’est conformé à cette volonté nettement exprimée. Mais il ne nous a pas été interdit d’honorer sa mémoire dans le lieu même de nos réunions. Aussi je voudrais essayer, malgré mon insuffisance, de vous rappeler les étapes de sa carrière scientifique si bien remplie, si féconde ; je voudrais dire ici quelques mots de sa vie consacrée tout entière à l’étude, au bien, à la défense de ses plus chères convictions.

« Né au Havre le 8 août 1832, Léon Gautier fit ses études à Laval ; il les termina au collège Sainte-Barbe. Entré à l’École des chartes, il en sortit en 1855 avec le titre d’élève pensionnaire. Il fut aussitôt attaché, en qualité de secrétaire, à Francis Guessard, auquel le ministère de l’Instruction publique venait de confier la direction du Recueil des anciens poètes de la France ; il accompagna le savant philologue en Suisse et en Italie. C’est à Venise, à la bibliothèque Saint-Marc, qu’il découvrit un long poème, écrit en français par un Italien ; il en fit bientôt apprécier l’intérêt et le mérite. Il l’analysa avec soin dans la Bibliothèque de l’École des chartes sous le titre de l’Entrée en Espagne. Il préludait ainsi à ses belles études sur l’origine et l’histoire de notre littérature nationale auxquelles il devait attacher son nom.

« Nommé archiviste de la Haute-Marne à la fin de l’année 1856, il occupa ce poste pendant deux années. Le 1er mars 1859, il entrait aux Archives nationales, où il resta pendant trente-huit ans, consacrant ses forces et son activité à classer, à faire connaître et apprécier les richesses de ce grand établissement scientifique. En 1893, il y remplaça notre regretté confrère Siméon Luce, comme chef de la section historique.

« Ses principaux travaux se rapportent à la poésie liturgique, à l’histoire littéraire, à la paléographie.

« C’est sur les bancs de l’École des chartes qu’il écrivit ses premiers