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Edrisi donna l’exemple par un portulan de l’Afrique septentrionale contenu dans sa géographie[1]. Du xiie siècle, on connaît encore une carte de la Sardaigne, puis un portulan de la Méditerranée occidentale[2]. Les mappemondes du Saint-Nicolas, sur lesquelles on pointait au compas la route parcourue, étaient à une grande échelle, puisque la traversée se bornait au parcours de Messine à Tripoli. Le fait qu’elles étaient à une grande échelle entraîne cette conséquence qu’elles étaient spéciales à certains parages. De leur bas prix, en effet, sept tarins dix gros avec compas, et six ou sept tarins sans cet accessoire, nous pouvons conclure que c’étaient d’humbles planisphères et non pas de ces atlas comme ceux de Pierre Vesconte ou Visconti, de Gênes, en usage vingt ans plus tard.

Dans les atlas de Vesconte, dans celui de 1313 tout au moins, que le prince Roland Bonaparte a récemment offert à la Bibliothèque nationale, on distingue les vestiges des cartes restreintes utilisées par le Génois pour telle ébauche de l’Italie méridionale, par exemple. La partie vraiment originale de l’œuvre de Vesconte consiste dans le contour des côtes de l’Océan, de la Manche et de la mer du Nord jusqu’à Berwick et jusqu’en Danemark. Ces parages étaient le théâtre des opérations de l’escadre génoise, que Philippe le Bel entretenait à son service depuis 1294[3]. C’est à cette connaissance du Ponant que la cartographie génoise dut son succès et l’œuvre de Vesconte son débit : de lui, subsistent des atlas de 1311, 1313, 1318, 1321, et nous savons qu’il fut appelé à Venise, au moment où la cité des lagunes organisait les convois de Flandre.

À part ces notions, qui leur appartiennent en propre, les Génois ne furent, en cartographie comme dans toutes les branches de l’art naval, — et ceci, je le prouverai ailleurs, — que des ouvriers de seconde main, des colporteurs de la civilisation sicilienne, dérivée de l’art arabe. Il n’est pas besoin, du reste, de supposer une relation de cause à effet entre la vente des mappemondes du Saint-

    lémée. (Cf. Dr Théobald Fischer, Sammlung mittelalterlicher Welt- und Seekarten italianischen Ursprungs und aus italianischen Bibliotheken und Archiven. Venedig, 1886, in-8o, p. 87.)

  1. Fischer, ouvr. cit., p. 67.
  2. Fischer, ouvr. cit., p. 59.
  3. Ch. de La Roncière, le Blocus continental de l’Angleterre sous Philippe le Bel, dans la Revue des Questions historiques, 1896, p. 411.