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DES ANNALES DE FLODOARD.

Comme le chiffre ΛΓ (33) correspond à l’année 925, en remontant d’année en année, 919 aurait pour no  ΚΖ (27). Ce ne peut être là, nous semble-t-il, un commencement de série ; la numérotation devait partir d’Λ (1). Or, Λ correspondrait à l’année 893, qui est la date initiale du règne de Charles le Simple, à partir duquel Richer commence son récit[1]. Donc il a dû exister 26 paragraphes correspondant aux années 893-918.

Nous sommes alors dans l’alternative posée par Wattenbach. Ou cet ensemble de paragraphes numérotés par année de 893 à 900, dont l’existence nous est ainsi révélée, doit être attribué à Flodoard d’un bout à l’autre, ou la partie postérieure à 919 seule émane de lui, et la partie antérieure aurait été juxtaposée et serait l’œuvre disparue d’un auteur inconnu.

Cette dernière hypothèse (de Wittich) nous paraît la plus compliquée des deux, car elle nous force à admettre l’existence d’une œuvre annalistique s’étendant de 893 à 919 dont aucune trace ne nous serait parvenue. Il nous paraît plus vraisemblable de supposer que le début des Annales ait été l’année 893 et que la partie concernant les années 893-919 se soit perdue de bonne heure. De même que les plus anciens manuscrits (lat. 9768, 6332 reg. du Vatican) présentent une addition (relative à l’année 877), ils peuvent aussi offrir une lacune de quelques années. Les mentions relatives aux années 893-919 auraient été négligées, soit à cause de leur brièveté, soit pour tout autre motif, à moins que l’original ou les premières copies n’en eussent été accidentellement privés.

On peut ajouter, comme argument en faveur de cette hypothèse, que Richer, qui commence son récit avec Charles le Simple, dit

    années de la vie de Flodoard, on pourrait peut-être songer à conclure que ces chiffres désignent l’âge de l’auteur. Mais il serait bien étrange que, dans un ouvrage qui n’a pas le caractère de mémoires personnels, Flodoard ait eu l’idée de mettre son âge à côté de chaque année de l’incarnation. Il a d’ailleurs eu soin de nous dire son âge à l’année 963, quand il abdiqua sa charge de prêtre à soixante-dix ans. — C’est cette même idée de numéroter les paragraphes d’années qui a fait mettre au scribe du ms. du Vatican les chiffres romains I, II, III, en tête des années 877, 919, 920.

  1. Richer (Hist., l. I, c. 3) dit lui-même : « … Karolum, a quo historiae sumemus initium. » En réalité, il rapporte au début certains événements plus ou moins légendaires du règne d’Eudes. C’est à tort que Wattenbach avance que Richer prend la suite de l’œuvre d’Hincmar et commence son ouvrage en 882 (Deutschlands Geschichtsquellen, I, 413).