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respondant à l’année 947 ; c’est ΝϜ, c’est-à-dire 56. On rencontre encore des chiffres en 949 (ΝΖ), 950 (ΝΗ), 952 (Ξ). À l’année 953, où cesse la numérotation, il manque un Λ après le Ξ pour faire 61.

Dans le ms. 6332 reg. du Vatican, la numérotation grecque se retrouve aussi à partir de 925 (ΛΓ), comme dans le manuscrit de Montpellier, et continue jusqu’en 965 (ΟΓ)[1].

Les erreurs et les déformations des lettres, ainsi que les lacunes de cette numérotation, montrent que les scribes n’en comprenaient pas le sens. Il y a même, dans le manuscrit de Montpellier, deux gloses au fol. 56, à côté du chiffre ΜΖ (47), qui est à la fin de l’année 939. Pertz avait essayé de les déchiffrer et avait lu « autanda » « mal. » Il faut lire, à droite du chiffre, « mater, » et, au-dessus, « aut alia. » C’est bien là un essai d’interprétation fait par quelqu’un qui ignorait la numérotation grecque. Le glossateur a pris ΜΖ pour ΜΤ et a lu « mater, » puis il s’est ravisé et a mis « aut alia » (ou autre chose). L’écriture de ces gloses ne paraît guère postérieure à celle du manuscrit.

Si l’on remarque qu’il existe une concordance parfaite entre les numérotations fournies par les quatre manuscrits, qui cependant sont de familles différentes, on est conduit à admettre que cette suite de chiffres grecs se trouvait dans l’original.

Quel pouvait être le but de cette numérotation ?

Il est difficile d’en reconnaître un autre que celui de marquer la suite des paragraphes correspondant aux années[2].

  1. Sur ce manuscrit, voy. Couderc, loc. cit., p. 725. Le manuscrit est composé de quatre cahiers, les deux premiers de douze feuillets, les deux derniers de huit ; le dernier feuillet a été coupé, de sorte que le manuscrit n’a plus que trente-neuf feuillets de parchemin. Il contient, sous le titre : « Incipiunt Gesta Francorum » les Annales de Flodoard (années 877 + 919-966), avant leur continuation (966-978). Il a appartenu à Guillaume, abbé de Saint-Bénigne de Dijon (991-1001), puis de la Trinité de Fécamp (1001-1028), qui se retira à Saint-Taurin d’Évreux, où il mourut en 1031. Guillaume avait sans doute pu faire transcrire les Annales grâce à Bruno de Roucy, chanoine de Reims, puis évêque de Langres (981-1015), son protecteur, qui apporta peut-être les Annales à Langres. Après la mort de Guillaume de Saint-Bénigne, le manuscrit a passé successivement à Saint-Taurin d’Évreux (XIe et XIIe siècles), puis à la Trinité de Fécamp (XII-XVe siècle), où il appartint à « Johannes Lucratis (?). » Nous devons les renseignements que nous possédons sur ce manuscrit à l’obligeance de M. G. de Manteyer, qui a bien voulu se charger de l’examiner pour nous au Vatican.
  2. De cette circonstance singulière que la numérotation correspond aux