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DISCOURS DE M.  SERVOIS, GARDE GÉNÉRAL DES ARCHIVES.


« Messieurs,

« Il y a peu de jours encore, M.  Lecoy de la Marche était au milieu de nous, luttant contre le mal qui, depuis plus d’une année, l’étreignait si durement, et réunissant ce qui lui restait de forces pour ajouter quelques pages à l’inventaire qu’il venait d’entreprendre. Samedi dernier, il nous quittait vaincu, mais ne voulant pas cependant désespérer de lui-même et parlant encore de l’avenir à l’ami, le plus bienveillant des chefs et le plus dévoué des confrères, qui, dans sa sollicitude, l’accompagnait jusqu’au seuil de sa maison.

« Il s’éteignit doucement deux jours après. La mort lui a été clémente ; mais il était de ceux qui savent l’envisager sans crainte : déjà, il y a seize mois, il l’avait sentie s’approcher de lui et n’avait pas faibli, puisant dans la foi qui inspira une partie de ses écrits autant de résignation qu’en permettaient ses préoccupations de père de famille, menacé qu’il était d’être séparé des siens avant d’avoir pu assurer et même préparer la destinée de chacun d’eux.

« Peu d’érudits auront publié un plus grand nombre d’ouvrages. Il est réservé à d’autres de vous parler de ceux qui ont presque popularisé son nom, des récompenses académiques qu’ils lui ont values, des mérites divers qui avaient recommandé, comme éditeur, notre savant et laborieux confrère au choix de la Société de l’histoire de France, de la Société des anciens textes, de la Société de l’École des chartes. Sans même rappeler les œuvres qu’il a tirées de l’étude de nos documents, je me bornerai à citer les travaux dont le soin lui fut confié par l’administration des Archives.

« Albert Lecoy de la Marche, que nous perdons à l’âge de cinquante-sept ans, appartenait depuis plus de trente-cinq années au service des archives, soit départementales, soit nationales. En 1861, quatre mois après la soutenance, à l’École des chartes, d’une thèse qui eut quelque retentissement et qui suscita d’assez vives polémiques, il reçut la mission d’organiser et de compléter, en provoquant les réintégrations nécessaires, les archives du département de la Haute-Savoie, récemment annexé à la France. Trois ans plus tard, M.  de Laborde l’appelait à Paris. À la section administrative, l’une de ses occupations fut la rédaction de l’inventaire des titres de la maison d’Anjou, que nous nous apprêtions, peu de jours avant sa mort, à mettre à la disposition du public.

« En 1871, il reçut de la direction générale des Archives une haute marque de confiance : il fut le continuateur, désigné par elle, de la publication de l’inventaire des Titres de la maison ducale de Bourbon,