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cette pièce, où la scission des territoires est si curieusement spécifiée, ne perdent donc rien de leur valeur et subsistent dans toute leur force. Comme corollaires à ce document, M. Chapellier, au cours de la même étude, citait particulièrement deux autres textes, l’un de 1500, où le village de Greux est dit « ou duchié de Bar, » l’autre de 1616, d’où il ressort que « la maison de Jeanne la Pucelle » est bien située sur le territoire de Domremy et non sur celui de Greux[1]. La première de ces deux assertions ne semble pas du tout constituer un argument sans réplique, ces sortes de dénominations territoriales étant souvent, par essence, aussi vagues que contradictoires, et Greux pouvant parfaitement, alors comme à d’autres époques, constituer un village mi-partie. Puis, si l’on veut bien se rapporter au texte même, et non pas seulement au fragment cité de la pièce, on voit que cet acte représente une requête adressée au roi de France à l’effet d’obtenir confirmation de l’exemption d’impôts concédée en 1429. Considérations qui rendent assez illusoire le passage invoqué par l’érudit lorrain. Quant à la seconde affirmation, à savoir que la maison de Jeanne d’Arc était située sur Domremy même, elle n’a jamais été révoquée en doute par qui que ce soit d’autorisé. Elle vient simplement confirmer ce que Jeanne d’Arc disait d’elle-même à un juge de France, à savoir « qu’elle était née à Domremy, village qui ne fait qu’un avec Greux » (interrogatoire préalable, séance du mercredi 21 février 1431)[2]. Ce dernier document produit par M. Chapellier, tout comme le précédent, et celui qu’ils accompagnent, doit donc être regardé comme absolument insuffisant à fournir un argument quelconque en faveur de la thèse en soutien de laquelle ils sont spécialement avancés. Tous trois sont intéressants sans doute, mais sans portée départageante, et aucune des raisons énumérées en appui de l’origine purement française de la Puceile ne peut s’en trouver atteinte ou atténuée[3].

Le seul point sur lequel la récente découverte d’un document vainement recherché jusqu’alors ait pu modifier les conclusions proposées depuis les recherches de M. Siméon Luce[4], est le suivant. À l’heure

  1. Deux actes inédits, p. 11 et 16. Textes cités de nouveau dans Étude sur Domremy. Le premier de ces actes, celui de 1500, a été, en réalité, produit pour la première fois, discuté et publié par M. Lepage, dès 1855, dans sa seconde Dissertation.
  2. Quicherat, Procès, t. I, p. 46 : « … nata est in villa de Dompremi, qua est eadem cum villa de Grus… »
  3. C’était sur la France que « s’orientait » Domremy et la région avoisinante, selon l’heureuse expression de M. Ludovic Drapeyron, dont M. l’abbé Georges cite plusieurs lettres privées, de 1885 à 1888 (p. 526-529), et qui a consacré à celte question une intéressante étude technique. (Une application de la géographie à l’étude de l’histoire, dans Revue de géographie, t. XV, nov. 1884, p. 321-332, et t. XIX, nov. 1886, p. 321-343.)
  4. Jeanne d’Arc à Domremy, Introd., ch. I.