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deux dans la prévôté d’Andelot, l’une des prévôtés du bailliage français de Chaumont-en-Bassigny[1]. Donc, quoi qu’il en soit, pour la période antérieure et postérieure au XVe siècle, il n’en est pas moins établi qu’au temps de la naissance et de la vie de Jeanne d’Arc, Domremy, ou tout au moins une des sections du village, était regardé comme partie intégrante du domaine et comme terre de France.

Tel était l’état de la question quand récemment un document fut produit, auquel les partisans de la cause lorraine se sont peut-être trop hâtés d’attacher l’importance décisive qu’ils semblent lui réserver. Je veux parler de la main-levée, en date du 12 septembre 1468, publiée par M. Chapellier dans sa dernière étude : Deux Actes inédits du XVe siècle sur Domremy[2]. De cette pièce, tirée des archives départementales de la Meurthe, il résulte qu’à cette date précitée de 1468, les autorités du bailliage français de Chaumont se voyaient obligées de lever une saisie indûment pratiquée, sous prétexte de défaut d’hommage, sur les fiefs de Jean IV, comte de Salm, sis à Domremy et à Greux[3]. M. Chapellier croit pouvoir en déduire que les deux villages tout entiers « étaient, comme toute la châtellenie de Gondrecourt, du Barrois Mouvant. » Conclusion parfaitement exagérée, l’acte en question prouvant tout simplement une fois de plus, — ce que personne ne songe à contester, — que la partie de la seigneurie de Domremy et de Greux, reconnue de tout temps, et encore en 1460, dans la décision de l’élection de Langres, comme relevant du Barrois, était classée comme en dépendant encore en 1468. C’est ce qu’une lettre privée de M. Siméon Luce, en date du 9 mars 1890, citée par M. l’abbé Georges (p. 524-525), met très nettement en lumière. C’est ce que vient confirmer un autre élément de discussion assez décisif, à ce qu’il semble, et qu’on pourrait s’étonner de ne voir invoqué nulle part, à savoir la remarque suivante. La section de Domremy signalée dans la décision de 1460 comme relevant seule du Barrois et celle indiquée dans la main-levée de 1468 comme dépendant également du duché de Bar sont exactement identiques. Dans l’un et l’autre acte, cette section est définie comme appartenant au comte de Salm, Jean IV, héritier direct des Bourlemont, anciens possesseurs, comme on l’a vu, de cette fraction du village[4]. Tous les arguments tirés de la décision de 1460, pour ne parler que de

  1. Tous ces actes de 1571 à 1603 ont été l’objet d’une discussion approfondie de la part de M. Wallon, Jeanne d’Arc, t. I, Appendice IX.
  2. Sous René d’Anjou, Domremy, Greux et Bazoilles, dans Deux actes inédits (voir ci-dessus, p. 162, n. 3).
  3. « Mainlevée de la saisie des fiefs de Greux et Dompremy, » en date du 12 septembre 1468, Pièce justificative ; Deux actes inédits, p. 12-15. Texte analysé de nouveau dans Étude sur Domremy.
  4. Sur l’identification de ce personnage, Siméon Luce, loc. cit., Suppl. aux Preuves, XXXIX, p. 350, n. 2.