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BIBLIOGRAPHIE.


Histoire poétique des Mérovingiens, par Godefroid Kurth, professeur à l’Université de Liège. Paris, Picard, 1893. In-8o, IV-552 pages. Prix : 10 francs.


La Bibliothèque de l’École des chartes aurait dû depuis longtemps rendre compte du très important ouvrage de M. Kurth, mais il n’est jamais trop tard pour annoncer un bon livre, et l’ouvrage du savant professeur de Liège rentre assurément dans cette dernière catégorie. L’exposition en est parfois un peu prolixe, quelques-unes des remarques de l’auteur peuvent paraître discutables et subtiles, mais le tout est, pour employer un terme fort goûté aujourd’hui, extrêmement suggestif, et alors même que sur tel ou tel détail il ne partage pas absolument l’opinion de l’auteur, le lecteur est amené à réfléchir et à se faire une idée plus précise des conditions auxquelles est soumise la connaissance des faits historiques.

Le titre suffit à lui seul pour indiquer l’objet des recherches de M. Kurth ; il s’est proposé de dégager dans les premiers livres de Grégoire de Tours, dans le pseudo-Frédégaire, enfin dans les Gesta regum Francorum, les éléments traditionnels et poétiques. Mais ce titre, à parler franc, ne nous satisfait pas entièrement ; il est trop particulier, trop affirmatif, et de nature à prêter à l’auteur une tendance au paradoxe, tendance qui existe bien dans une certaine mesure, mais que corrige fort heureusement la conclusion même du volume, pleine de sages réserves.

Le sujet traité par M. Kurth a déjà tenté plusieurs érudits. Sans parler des vues fort sages exposées en passant par des hommes tels que Fauriel et Ampère en France, et Schlegel en Allemagne, trois écrivains jusqu’ici ont, à notre connaissance, étudié la question : Arsène Darmesteter, dans son étude sur Floovant, Junghans dans l’Histoire de Chlodovech, qu’a traduite et annotée M. G. Monod, et enfin Pio Rajna, dans le célèbre ouvrage sur les origines de l’épopée française. Tout le monde reconnaît que les historiens plus haut cités renferment quantité de traditions populaires, d’origine incertaine, et personne aujourd’hui ne s’aviserait d’écrire des Récits mérovingiens, à la façon de ceux d’Augustin Thierry, dans lesquels ces mêmes traditions servent à enjoliver