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sommer le capitaine de se rendre. Il s’appelait Henri de Vaux[1]. Ainsi mis en demeure, il ne fit que rire de la menace ; mais, le capitaine anglais lui ayant offert de lui montrer pourquoi sa sommation était sérieuse, il réfléchit, sortit après avoir pris des sûretés. On lui montra la mine et les étançons qui seuls soutenaient un pan de mur de la tour ; il comprit qu’il était perdu et se rendit avec ses hommes (6 janvier 1360) (n. st.). Quand ils furent sortis, Barthélémy de Burghersh fit mettre le feu aux étançons dont la chute entraîna l’écroulement d’un pan de la tour qui s’ouvrit en deux (9 janvier) ; en même temps, le bourg fut détruit[2].

Tous ces succès n’avançaient pas en somme les affaires du roi d’Angleterre, qui se trouvait devant Reims au même point que lors de son arrivée, au commencement du mois de décembre. En outre, il apprit, probablement en même temps que les habitants de Reims, que des gens d’armes se réunissaient à Troyes pour les secourir. Le 1er décembre, en effet, le connétable de France était à Auxerre[3], puis il alla à Troyes, d’où il devait mener les troupes devant Reims, et, s’il est vrai que le régent le rappela quelques jours auprès de lui, il n’en promettait pas moins, le 26 décembre, aux habitants de Reims de l’envoyer au plus tôt à leur aide[4].

Soit donc qu’Édouard III eût peur d’être pris entre la garnison de Reims et le corps de secours, ou qu’il vît simplement qu’il fallait renoncer à emporter Reims, il se décida à lever, le 11 janvier 1360, le siège qui durait depuis plus de cinq semaines. Le roi d’Angleterre se dirigea ensuite vers le sud et cette campagne entreprise avec une armée formidable et des préparatifs immenses, après le retentissant échec de Reims, un plus bruyant échec encore devant Paris, ne servit sans doute qu’à assurer aux Anglais les concessions que la lassitude et la misère générales imposèrent au régent par le traité de Brétigny.


H. Moranvillé.
  1. D’après Froissart, éd. Luce, t. V, p. 220, Henri de Vaux était Champenois, portait de sable à cinq anneaux d’argent, et son cri était « Viane. » Or, un armoriai du xve siècle donne parmi les chevaliers de la province de Champagne : « Le sire de Vaulx, de sable à v aniaulx d’argent, et crie : Viane. » (Bibl. nat., volumes reliés du Cabinet des titres, no  927, p. 70.) Ceci montrera une fois de plus, comme on l’a vu plus haut dans un cas analogue, combien Froissart, en certaines circonstances, a été sûrement informé, même pour de menus détails.
  2. Twysden, Rerum Anglicarum… scriptores X, t. II, col. 2622.
  3. Froissart, éd. Luce, t. V, p. lxv, note 2.
  4. D. Marlot, Histoire de la ville, cité et université de Reims, t. IV, p. 84.