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rations de l’esprit et les confier à deux hommes différens, lorsque, dans ces discussions privées des sociétés dont se forme le jugement suprême et presque toujours infaillible de l’opinion publique, l’esprit de l’homme se sent invinciblement entraîné à les réunir ? N’est-ce pas contrarier trop ouvertement la méthode de délibérer et de juger que la nature impose à l’esprit humain ?

« Quand j’ai déterminé un fait, ne l’ai-je pas déjà jugé ? et dans ma parole comme dans ma pensée, l’approbation ou le blâme de ce fait ne succèdent-ils pas, au moment même, à sa détermination ?

M. Duport compare ailleurs un jugement à un syllogisme. J’ai reconnu dans Beccaria la justesse de la comparaison ; je ne la contesterai pas à M. Duport.

« Mais coupa-t-on jamais un syllogisme en deux pour en faire déterminer les prémisses par des ignorans en logique, et tirer ensuite la conséquence par de bons logiciens ? Veuillez, je vous en conjure, vous charger seul de toute sa composition ; j’en aurai bien moins à craindre de ne pas le trouver exact dans toutes ses parties ; et vous verrez vous-même que quand vous en aurez d’abord déterminé la majeure, et ensuite la mineure, la conséquence aussitôt viendra d’elle-même se placer dans votre pensée et dans votre parole sans que vous puissiez la repousser ni de l’une ni de l’autre.

« Mais une erreur trop étrange qui échappe à M. Duport dans cette comparaison d’un jugement à un syllogisme, et par laquelle il prépare lui-même l’écroulement de tout son système des jurés, sans qu’on puisse concevoir aucun échafaudage qui le retienne, la voici : la majeure est le fait, la mineure est la loi, le jugement la conséquence.

« Et moi, de par un oncle professeur de philosophie, assez estimé dans sa province, qui, jadis, dans un beau latin moderne, me dicta les leçons de la logique du Port-Royal, j’ose hardiment répondre à M. Duport qu’un syllogisme, pour être bon, doit, premièrement, dans la majeure retracer une vérité générale avouée de tout le monde, et par conséquent la loi dans le syllogisme jugement ; car il n’y a de vérité vraiment avouée que la loi. Secondement, dans la mineure, déterminer le rapport particulier du sujet contentieux à