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l’humble demeure est aimé et choyé.

Les deux femmes parlent à voix basse, de temps en temps les regards de la plus jeune se voilent d’une larme.

— Pauvre amie, dit-elle. Bientôt elle sera morte. Qui prendra soin de son enfant ? lorsque j’étais malade, moi, c’est elle qui soignait mes mioches. Si mon homme le voulait !… mais l’hiver a été dur, bien dur, je n’ose lui demander ça, et tenez ça me fait une douleur qui m’étouffe quand j’vas la voir c’te pauvre voisine. J’dors pes d’la nuit parce que je comprends ben dans ses grands yeux mourants, c’qu’elle veut m’demander et qu’elle n’ose pas parce qu’al attend que j’lui en parle.

— Vous croyez donc qu’al n’en reviendra pas ?

— Dame, elle est pomonique on n’en revient jamais de c’te maladie-là, avec ça les inquiétudes de la pauvreté, la pensée de laisser son enfant à des inconnus la minent plus vite encore, Pauvre amie.

La jeune femme essuie, avec le revers de son tablier d’indienne, une larme coulant lentement de ses yeux.

Ouf, la porte s’ouvre subitement et une rafale de neige, pénètre dans l’intérieur en même temps qu’un grand gaillard à stature d’athlète, à la physionomie rude, mais à l’expression franche, honnête.