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rais données pour vous être agréable, vous m’auriez oubliée l’instant d’après, pour ne jamais plus vous souvenir. Vous auriez peut-être dit : C’est une femme d’esprit ; mais des femmes d’esprit on en trouve partout. En m’accusant de ne pas avoir le sens commun, vous me faites beaucoup de plaisir, c’est la preuve que je ne vous suis pas tout à fait indifférente. Vous voyez jusqu’à quel point je tiens à vous plaire, puisque je consens à paraître ridicule pour cela. Oui, je suis heureuse en pensant que souvent votre esprit est occupé de moi ; c’est une si grande joie de se sentir nécessaire à quelqu’un, que je ne puis me décider à vous obéir. Je veux plutôt braver votre courroux, car, écoutez-moi, Gaston, si vous me voyiez, tout ce que vous me dites éprouver pour moi sans me connaître disparaîtrait. J’en suis sûre. Si je ne réponds pas à l’idée que vous vous êtes faite de ma personne ; si je suis laide, par hasard ; si vous avez cru avoir affaire à une jeune fille à l’âge des illusions, des rêves, à l’âge où l’on ne connaît pas encore les déceptions, les revers du monde, à l’âge heureux enfin où l’on aime, l’on peut être aimée ; et que vous rencontriez à sa place une vieille femme presqu’une grand’mère.

« Dites, que ferez-vous. Vous me détesterez souverainement, vous m’accuserez de vous avoir trompé, cependant je ne vous ai jamais