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Votre crime était grand, vous aviez oublié le monde entier, il fallait disparaître ; tous les fluides magnétiques, diaboliques, déchaînés contre vous, en même temps, vous précipitèrent dans ces eaux perfides, qui vous guettaient.

Ainsi pensant, émue, la jeune fille, entra, ne voulant plus regarder cette onde méchante. Impressionnable et tendre cette mort l’attristant. Lentement elle se dirigea vers le piano, inconsciente de tout ce qui l’entourait, ses doigts firent vibrer sur l’instrument les tristesses de son âme. Les impressions qu’elle venait d’éprouver elle n’aurait pu les dire, mais elle les exprimait avec une telle impression, une harmonie si suave, elle rendait des sons si réels, qu’on eût cru entendre une voix, des paroles, des soupirs, des gémissements, puis enfin des sanglots noyés dans un complet délire.

Perdue dans sa rêverie elle jouait, jouait toujours sans s’apercevoir qu’on avait fait cercle autour d’elle, qu’on l’écoutait avec extase. Enfin elle s’arrêta au contact d’une main tremblante qui inconsciemment s’était posée sur la sienne, un beau visage mâle et fier, le regard humide de larmes, penché vers elle, la contemplait et Lionel murmura.

— Pardon, excuse, mademoiselle, je me suis oublié, ce que vous venez de dire est si beau, si