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vaient aidé à supporter cet isolement volontaire, dont cependant saignaient toutes les fibres de son âme, par ce qu’il était plus noble ; plus grand que la généralité des êtres humains, il ressentait une douleur immense de se sentir toujours seul au milieu de son entourage.

Découragé il se demandait, avec tristesse, si le gardien suprême de tous les mystères physiques, métaphysiques, hiératiques, systématiques, l’avait jeté dans l’océan universel, lui infime atome, pour suivre le sentier déjà battu des primitives générations, acceptant comme un legs héréditaire les jouissances matérielles, sans préoccupation du véritable idéal, qui nous rapproche du Souverain des mondes ; si toutes ses aspirations devaient s’éteindre faute d’aliment, comme les pâles rayons de l’astre des heures sombres à l’approche du jour.

Sa mélancolie augmentait, ainsi que les ombres de la nuit, elles aussi entraient dans son cœur, avec les mornes solitudes des régions environnantes. Cet homme si brave, si courageux, pour affronter les périls, pour supporter les douleurs physiques, les plus cuisantes, avait quelquefois, telle qu’une petite femme nerveuse, des défaillances, des désespérances, devant son impuissance à trouver le remède au mal moral qui voilait tout son ciel. Parfois au milieu du Sahara il s’était arrêté ému, surpris aux accents de sa voix répétant à son insu :