Page:Bibaud - Les fiancés de St-Eustache, 1910.djvu/28

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
20
LES FIANCÉS DE ST-EUSTACHE

avait quitté ses vêtements d’étoffe du pays pour l’habit du soir. Le jeune homme possédait ce cachet particulier aux gens nés de parents bien ; habitués dès l’enfance à se couvrir de tissus fins, de lainés recherchés, ils conservent toute leur vie ce je ne sais quoi qui les distingue des foules, les faisant remarquer malgré tous les changements de fortune qu’ils peuvent avoir subis : dès qu’ils endossent le vêtement de cérémonie, ils redeviennent eux-mêmes, ils entrent dans leur élément, c’est-à-dire qu’en les apercevant on fait la remarque : — Ce monsieur est le fils de cette femme supérieure qui réunissait chez elle une société d’élite. Cette dame est la fille de ce savant orateur, dont la parole éloquente entraînait les masses. — Souvent ce monsieur, cette dame ne sont eux-mêmes que de parfaites nullités, mais ils ont ce lustre du vrai diamant qui ne s’éteint pas : dès qu’on les enchâssent dans la monture convenant à leur feu, ils éclipsent tous les autres bijoux. Ainsi les hommes, les femmes sachant porter la toilette auront toujours, quoiqu’on en fasse, cette supériorité sur les autres dans leur tenue, parce qu’ils ont ce que ni le malheur, ni la pauvreté ne peut leur enlever ; le père était un gentilhomme, la mère une dame, ils sont nés dans un milieu policé ; ils peuvent avoir déchu, n’importe, on les reconnaît au moindre geste, à la main qui s’avance,