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LES FIANCÉS DE ST-EUSTACHE

Vaincus, ah ! ils ne l’étaient pas ces héroïques patriotes ; sous le nombre ils étaient écrasés ; mais ils gagnaient à leurs enfants la liberté et les privilèges pour lesquels ils avaient si vaillamment combattu, et les droits dont nous jouissons aujourd’hui, sous le drapeau britanique, nous les devons à ceux qui s’offrirent en holocauste pour leurs frères, aux Chénier, aux Delorimier, aux Cardinal, aux Duquette, tous morts pour le triomphe final des nobles idées qu’ils défendaient.

Partout les torches allumées continuaient les ravages dans Saint-Eustache. Le presbytère, le couvent, les maisons flambaient. On voyait s’enfuir la population effrayée, les femmes, les enfants sortaient de leurs demeures pour chercher ailleurs un abri, tandis que les soldats pillaient, ravageaient. La scène était horrible, le râle des mourants, le gémissement des blessés se mêlaient aux craquements des poutres qui s’effondraient sous les flammes.

Madame Chénier, son enfant, Lucienne accompagnées du Dr Bussière, d’Edmond, fuyaient aussi le lieu du sinistre désastre, lorsque tout à coup un soldat, ivre de carnage surgit devant eux. Mademoiselle Aubry pousse un cri de terreur et, prompte comme l’éclair, fait un rempart de son corps au Dr Bussière que l’Anglais ajuste ; elle s’affaisse frappée mortellement, dans les bras de son vieux protecteur.