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le secret de la marquise

mais tout cela ne détacha pas Louise de Marie, elle la voyait souvent, toujours avec un nouveau plaisir ; les grandeurs ne purent jamais changer son noble cœur. On conçoit ce qui se passait en elle aujourd’hui en voyant Marie condamnée, l’espoir qu’elle avait conservé jusqu’alors s’était envolé à la vue de sa nourrice, il était évident que la mort la réclamait. Cette pensée amère, unie à celle de l’indifférence de son cousin, lui causait un tel désespoir qu’au bout de quelques minutes de marche elle se laissa tomber avec découragement sur une grosse pierre. Là, inconsciente de tout ce qui l’entourait, elle s’abandonna à une douleur immense. Tout ce qu’elle avait souffert depuis un mois, tout ce qu’elle souffrait en cet instant avaient tellement endolori son âme que les sanglots qui agitaient son corps étaient un soulagement. Combien de temps pleura-t-elle ainsi ! elle n’aurait pu le dire ; mais à mesure que les nerfs se détendaient, le calme revenait dans son esprit ; cependant elle ne pensait pas au retour, le regard dans le vide, elle poussait de ces profonds soupirs qui généralement suivent les pleurs, lorsque soudain elle sentit une main se poser sur son épaule, et une voix lui dire doucement :

— Quoi, Louise, c’est vous ! que faites-vous ici seule, l’orage va bientôt venir ; ma pauvre enfant, vous pleurez ! confiez-moi le sujet de vos pleurs, qui a pu vous attrister ?

C’était Hector. À sa vue, Louise se reprit à sangloter. Il lui prit les mains :

— Louise, dit-il, n’avez-vous pas assez de confiance en moi pour me dire ce qui vous afflige ainsi ? Croyez-vous que je ne saurais y sympathiser, avons-nous donc vécu si longtemps sous