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le secret de la marquise

une à une elle avait constaté chez lui l’absence des belles qualités qu’elle avait cru remarquer au premier abord, son amour aurait pu cesser ; mais avoir près d’elle l’idéal de ses rêves, n’avoir à lui reprocher aucun tort, avoir pour un instant dans ce baiser de retour senti leur âme s’échanger, puis tout à coup le vide se faire autour d’elle, c’était une amère douleur, qui chaque jour creusait des traces plus avant sur ce jeune visage, et malgré tout le soin qu’elle prenait à paraître gaie, il était visible qu’un secret chagrin la minait.

Hector, lorsqu’elle ne le voyait pas, la suivait sans cesse du regard, comme pour vouloir sonder ce qui se passait dans son cœur. Si la jeune fille chantait, il l’écoutait dans une rêverie amère. Parfois sa voix avait des accents si émus qu’elle le faisait tressaillir. Il aurait voulu alors aller se jeter à ses pieds, lui avouer qu’elle était plus que sa vie ; mais la présence de sa mère le glaçait, l’idée qu’il la ferait souffrir le retenait, il courait s’enfermer dans sa chambre, tourmenté par le besoin d’épancher son âme et la crainte de troubler le repos de la marquise.

Un soir que la jeune fille s’était attardée au dehors, que le ciel se couvrait d’épais nuages, Hector, craignant qu’elle ne fût prise par l’orage, sortit pour aller à sa rencontre. Il savait combien Louise s’effrayait du tonnerre et, ne voulant pas qu’elle fut seule en route, si la pluie venait à tomber, il marchait très vite, afin de la rencontrer plus tôt. L’attraction qui l’entraînait toujours vers elle semblait avoir plus d’empire sur lui que jamais : Pourquoi, se disait-il, ne lui avouerais-je pas tout ce qu’elle est pour moi !