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gouverneurs du Canada, remarque Charlevoix, avaient eu ordre de la cour de France de défendre aux colons de vendre de l’eau-de-vie aux Sauvages ; et le baron d’Avaugour, en particulier, avait décerné les peines les plus graves contre ceux qui contreviendraient à cette défense. Une femme de Québec y ayant contrevenu, fut conduite en prison. À la prière de ses parens ou de ses amis, un jésuite crut pouvoir intercéder pour elle. Le gouverneur reçut très mal le religieux, et lui dit finalement, que puisque la traite de l’eau-de-vie n’était pas une faute pour cette femme, elle ne le serait à l’avenir pour personne. La chose ne tarda pas à être connue du public, et suivant l’historien que nous venons de citer, le désordre devint extrême. L’évêque de Pétrée crut devoir recourir aux foudres de l’église ; les prédicateurs tonnèrent dans les chaires ; les confesseurs refusèrent l’absolution. Le zèle outré du prélat et des ecclésiastiques excita contre eux des plaintes amères et des clameurs injurieuses : quelques particuliers firent contre le clergé des mémoires et des requêtes qu’ils envoyèrent au conseil du roi. Le prélat prit le parti de passer en France, pour, de son côté, porter ses plaintes au pied du trône. Le roi lui donna gain de cause, et il y a même lieu de croire que ce fut à sa demande que M. d’Avaugour fut rappellé.

La fin de cette année 1662, et une partie de la suivante, furent remarquables par une suite de violents tremblemens de terre, et un nombre d’autres phénomènes, que l’imagination déréglée et effrayée de la multitude exagéra d’une manière tout-à-fait ridicule, comme on en pourra juger par les extraits suivants des journaux des jésuites copiés par le P. Charlevoix.