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lissade, en disant : « Que la rivière les emporte si loin qu’il n’en soit plus parlé. » Il présenta, en même temps, un collier aux députés, comme un gage de la liberté qu’il rendait aux enfans d’Ononthio[1]. Puis, prenant deux paquets de peaux de castor, il les mit aux pieds des captifs, en disant qu’il n’était pas raisonnable de les renvoyer nus, et qu’il leur donnait de quoi se faire des robes. Il reprit ensuite son discours, et dit que tous les cantons iroquois désiraient ardemment une paix durable avec les Français, et qu’il suppliait, en leur nom, le gouverneur de cacher sous ses habits les haches des Algonquins et des Hurons, tandis qu’on négocierait cette paix ; assurant que, de leur côté, il ne serait fait aucune hostilité.

Il parlait encore, quand deux canots d’Algonquins ayant paru à la vue de l’endroit où se tenait le conseil, les Iroquois leur donnèrent la chasse. Les Algonquins ne voyant nulle apparence de pouvoir résister à tant de monde, prirent le parti de se jetter dans l’eau et de s’enfuir à la nage, abandonnant leurs canots, qui furent pillés sous les yeux du gouverneur. Un procédé aussi indigne montra le peu de fond qu’il y avait à faire sur la parole des Iroquois, et la négociation fut rompue, à l’heure même.

C’était, remarque Charlevoix, une situation bien triste que celle où se trouvait le gouverneur général de la Nouvelle France, exposé tous les jours à recevoir de

  1. Ononthio, en langue huronne et iroquoise, veut dire Grande-Montagne, et c’est ainsi qu’on leur avait dit que se nommait M. de Montmagny. Depuis ce temps, ces Sauvages, et à leur exemple, tous les autres, appellèrent Ononthio le gouverneur général du Canada, et donnèrent au roi de France le nom de grand Ononthio.