Page:Bibaud - Histoire du Canada sous la domination française, Vol 1, 1837.djvu/61

Cette page a été validée par deux contributeurs.

suites s’étaient déjà donné de grands mouvemens pour lui procurer ce double avantage : deux dames illustres secondèrent leurs vues, et mirent leurs projets à exécution. La duchesse d’Aiguillon voulut être la fondatrice de l’Hotel-Dieu : elle s’adressa aux hospitalières de Dieppe, qui s’offrirent toutes, mais dont trois seulement furent acceptées. La fondation des ursulines fut dûe à une jeune veuve de condition, nommée Madame de la Peltrie. Cette illustre fondatrice consacra ses biens et sa personne même à cette œuvre méritoire. Après avoir obtenu trois ursulines, entre lesquelles était la sœur Marie de l’Incarnation, que Charlevoix appelle la Thérèse de la Nouvelle France, elle s’embarqua à Dieppe, avec elles et avec les trois hospitalières, le 4 mai 1639, sur un vaisseau qui n’arriva à Québec que le 1r. août. Le jour de leur arrivée fut un jour de fête pour toute la ville. Tous les travaux cessèrent ; toutes les boutiques furent fermées. Le gouverneur reçut les religieuses, à la tête de ses troupes, qui étaient sous les armes, et au bruit du canon. Il les mena, au milieu des acclamations du peuple, à l’église, où le Te Deum fut chanté en actions de grâces. Les hospitalières allèrent s’établir à Sylleri : les ursulines restèrent à Québec. Madame de la Peltrie poussa son zèle et sa charité jusqu’à se dépouiller du peu qu’elle s’était réservé pour son usage ; à se réduire à manquer parfois du nécessaire, et à cultiver même la terre de ses mains, pour avoir de quoi soulager les nécessiteux et les enfans pauvres qu’on lui présentait. Ce zèle peut paraître bien excessif, et même peu éclairé, puisqu’en se réservant un revenu, même modique, elle se fût trouvée en état de subvenir aux besoins des