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Le père, qui ne s’était pas attendu à une pareille réponse, retourna aussitôt à son bord. Il écrivit, le lendemain, à son fils, dans les termes les plus pressants et les plus tendres ; mais sa lettre ne produisit aucun effet. Enfin, il lui fit dire qu’il était en état d’emporter par la force ce qu’il ne pouvait obtenir par ses prières ; que quand il aurait débarqué ses troupes, il ne serait plus temps pour lui de se repentir d’avoir rejetté les avantages qu’il lui offrait, et qu’il lui conseillait, comme père, de ne pas le contraindre à le traiter en ennemi.

Ces menaces furent aussi inutiles que l’avaient été les sollicitations et les prières. Latour, le père, en voulut venir à l’exécution : on attaqua le fort ; mais le jeune officier se défendit si bien, qu’au bout de deux jours, le commandant anglais, qui n’avait pas compté sur la moindre résistance, et qui avait déjà perdu plusieurs soldats, ne jugea pas à propos de s’opiniâtrer davantage à ce siège. Il le déclara à Latour, père, qui se trouva fort embarrassé : comment, en effet, retourner en Angleterre, et s’exposer au ressentiment d’une cour qu’il avait trompée ? Quant à son pays natal, il ne pouvait songer à y rentrer, après l’avoir voulu trahir. Il ne lui resta d’autre parti à prendre que de recourir à la générosité de son fils : il le pria de souffrir qu’il demeurât auprès de lui ; ce qui lui fut accordé.