Page:Bibaud - Histoire du Canada sous la domination française, Vol 1, 1837.djvu/39

Cette page a été validée par deux contributeurs.

au pillage. Ensuite, par un singulier mélange de bassesse et de générosité, il offrit aux Français une espèce de barque ou chaloupe pontée, pour s’en retourner dans leur pays ; et cette chaloupe s’étant trouvée trop petite, il proposa à ceux qui savaient quelque métier d’aller avec lui en Virginie, leur promettant une entière liberté de conscience, et la faculté de repasser en France, au bout d’un an. Plusieurs acceptèrent ces offres, et le sieur Lamotte, le P. Biart, et deux autres jésuites, que M. de la Saussaye avait amenés de France avec lui, voulurent les suivre. Ce qui restait de Français s’embarqua sur la chaloupe, avec la Saussaye et le P. Masse. Ils traversèrent la Baie Française, et rencontrèrent, au port de la Hève, un navire qui les reçut tous, et les conduisit heureusement à St. Malo.

Ceux qui avaient suivi le capitaine Argall en Virginie n’eurent pas autant de bonheur : à leur arrivée à Jamestown, le gouverneur-général les condamna à mort, comme pirates. Argall eut beau lui représenter qu’il leur avait donné sa parole qu’on les traiterait bien, et qu’ils demeureraient libres, et qu’ils ne l’avaient suivi volontairement qu’à cette condition, le gouverneur lui répondit qu’il avait outre-passé ses pouvoirs ; que leur chef n’ayant point eu de commission, il ne pouvait s’empêcher de les regarder comme des forbans. Il ne restait à Argall d’autre moyen de les sauver que d’avouer sa supercherie à l’égard de leur commandant, et il eut assez de probité pour le faire.

La vue de la commission du sieur de la Saussaye désarma le gouverneur de la Virginie ; mais il prit, sur le champ, la résolution de chasser les Fran-