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l’administration du comte de la Galissonnière fut de trop courte durée : son successeur immédiat, quoique doué de talens, ne se montra pas animé du même zèle pour le bien public, et lui était de beaucoup inférieur du côté des connaissances acquises[1].

  1. « Si, sous le gouvernement français, dit M. Lambert, dans son voyage en Canada, les Canadiens avaient été disposés à cultiver les arts et les sciences, cette disposition se serait manifestée sous le comte de La Galissonnière, qui fut le gouverneur le plus actif et le plus éclairé qu’ait eu le Canada. Il était, à tous égards, un homme d’état accompli ; et ses connaissances dans l’histoire naturelle, la philosophie et les mathématiques furent utiles aux vues de son gouvernement. Il se procura des renseignemens des parties les plus éloignées de la Nouvelle France, concernant ses habitans, ses animaux, ses arbres et ses plantes, ses terres et ses minéraux ; ainsi que sur ses lacs, ses rivières et ses mers. Il s’était même mis en état de donner la description des endroits éloignés qu’il n’avait pas vus, mieux que ceux qui les habitaient. Enfin, M. de la Galissonnière était l’homme qu’il fallait pour réveiller, dans l’esprit des Canadiens, le goût des sciences et des arts, s’il n’y avait été qu’endormi. »

    Malheureusement, ce goût n’était pas encore né chez nos ancêtres. « On ne leur trouvait, dit l’abbé Raynal, aucune sensibilité pour le spectacle de la nature, ni pour les plaisirs de l’imagination ; nul goût pour les sciences, pour les arts, pour la lecture, pour l’instruction. Les habitans des villes passaient l’hiver, comme l’été, dans une dissipation continuelle. L’amusement était l’unique passion, et la danse faisait les délices de tous les âges. »

    « L’oisiveté et la frivolité, continue-t-il, n’auraient pas pris cet ascendant, en Canada, si le gouvernement avait su y occuper les esprits à des objets utiles et solides. » Mais loin de là, ce gouvernement semblait se complaire, ou trouver son intérêt à tenir le peuple dans l’ignorance : l’institution décorée d’abord du nom de collège ne fut jamais qu’une école élémentaire ; il n’y avait pas d’imprimerie dans le pays, et l’on ne pouvait y faire venir des livres de France qu’avec difficulté, et à grands frais.