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aux Iroquois. Il débuta par un acte qui portait des caractères si frappants de violence et de perfidie, qu’il aurait dû en prévoir les suites fâcheuses, s’il ne regardait pas à l’odieux de la chose en elle-même.

Depuis longtemps, Louis XIV avait donné ordre que les prisonniers de guerre iroquois fussent envoyés en France, pour y être mis aux galères, « parce que, disent les lettres royales, ces Sauvages étant forts et robustes, serviront utilement sur nos chiourmes. »

« Dans quel code, s’écrie un historien, est-il écrit que les prisonniers de guerre seront relégués parmi les coupables et jettés au milieu de la lie des hommes ? » Sans doute, ce code ne pourrait être que celui de la barbarie : mais ici il y a plus : ce n’est pas de prisonniers de guerre qu’il n’agit, mais des chefs d’un peuple avec qui l’on est encore en paix, qu’on fait tomber dans le piège, par des discours trompeurs et perfides, et à l’égard desquels on viole le droit des gens, de la manière la plus indigne. Sous divers prétextes, le gouverneur général attira les principaux chefs des Iroquois à Catarocouy ; les fit saisir, enchaîner, conduire à Québec par une forte escorte, et enfin embarquer pour la France, où les galères les attendaient. Ce qu’il y eut de pis, c’est que le marquis de Denonville se servit, pour cette affaire, du ministère de deux missionnaires, les PP. de Lamberville et Millet, sans faire attention que, non seulement il mettait ces religieux en danger de perdre la vie, mais qu’il décréditait, peut-être sans retour, aux yeux des Sauvages, la religion qu’on leur prêchait, depuis si longtemps, et qu’on paraissait avoir tant à cœur de leur faire embrasser.