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ne consistait peut être pas tant dans les récriminations, les animosités, les haines et les méfiances réciproques auxquelles il pouvait donner lieu alors[1], que dans l’exemple, l’encouragement fourni à la jeunesse, et particulièrement aux jeunes ou injudicieux rédacteurs de journaux politiques, de prendre le ton, non de la discussion logique, de la critique rationnelle, de la censure motivée et exprimée avec décence, discernement et discrétion, mais de l’insulte gratuite et grossière, du libelle diffamatoire, de l’appel aux passions, de la malignité ou de l’ignorance.

Les résolutions violemment accusatrices, ou amèrement complaignantes de la chambre d’assemblée ; les déclamations pétulantes et acerbes de quelques-uns de ses membres, et particulièrement de son orateur, ne firent pas croire à lord Aylmer que le peuple canadien était, ou avait été récemment, en butte à d’indignes outrages, accablé sous le poids de souffrances intolérables, encore moins qu’il fût devenu mécontent de son sort et déloyal ; mais elles purent avec l’ordre qu’il avait reçu et le désir qu’il montra de concilier, presque à tout prix, le majorité de cette chambre, contribuer à donner au commencement de son administration un air de timidité, ou de débonnaireté, qui devint par la suite préjudiciable aux affaires publiques et au pays[2]. Quand, plus tard, il voulut prendre un

  1. « La chambre d’assemblée a ouvertement énoncé et mis en avant des opinions jusqu’alors inouïes, et auxquelles on n’avait jamais pensé. » — Discours de M. Cuthbert.

    « Nous lisons journellement des discours de certains membres d’une autre chambre, qui nous font presque frissonner, et dans lesquels il semble s’agir de savoir si nous demeurerons sujets britanniques. » — Discours de M. Richardson.

  2. M. Young ayant appris qu’il devait être question du président du conseil législatif et qu’on se proposait d’attacher une condition au vote de son salaire, s’était rendu auprès du gouverneur, et lui avait demandé s’il voulait lui permettre de dire à l’assemblée que