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prit de parti[1]. Jamais cet esprit ne s’était encore montré tel au Canada, et la chambre d’assemblée pouvait dire avec vérité, que, sous ce rapport, « il n’y avait pas de parité » entre la métropole et la colonie, parce qu’en effet, il y avait supériorité de la dernière sur la première. L’esprit de parti de l’Angleterre était parvenu à une vieillesse approchante de la décrépitude, et son toryisme et son wighisme excitaient presque le rire, quand, de temps à autre, ils cherchaient encore à se remuer, à s’agiter, à se tourmenter, ou à tourmenter les autres : au Canada, au, contraire, il était dans toute la vigueur de la jeunesse, dans toute la faveur de la nouveauté : loin d’avoir rien perdu de ses forces, il semblait en acquérir tous les jours de nouvelles, comme il le prouva victorieusement, dans la session de 1829.

Cet esprit de parti n’avait point chassé l’esprit ordinaire ; il s’était accommodé avec lui, et il n’empêcha pas les orateurs de bien parler : MM. Papineau[2], Vallières, Viger, Blanchet, Cuvillier, Neilson, Berthelot, Quesnel, Lagueux, purent faire de beaux discours, mais ce fut inutilement, quand il s’agit de questions poli-

  1.  « Esprit qui fait que l’homme, au lieu de parler, beugle,
    Pour le vrai, pour le juste, est sourd, devient aveugle,
    Foule aux pieds le devoir, l’honneur, la vérité,
    Et, parfois, est poussé jusqu’à l’absurdité ;
    Surtout, quand jusqu’au bout voulant pousser sa pointe,
    Il se prend à quiconque à droit le contrepointe. »

  2. M. Papineau déclama quelquefois aussi longuement qu’inutilement contre lord Dalhousie et son administration ; mais dans les débats sur la pétition de M. J. B. Moreau, natif de France, qui résidait en Canada depuis sept ans, qui avait étudié cinq ans chez un notaire, et à qui cependant on refusait une commission, M. Papineau se montre, non seulement orateur, mais encore philosophe et bon politique. Plusieurs des phrases de son discours valent la suivante : « Les fastes historiques des nations présentent plusieurs lois absurdes et inconvenables ; aucune n’approche, si on la considère existante, de celle qui exclurait de cette colonie les Français catholiques, et qui y admettrait les Français protestants. »