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besoin. En effet, dix mois après l’échauffourée dont nous venons de parler, le sieur Collins voulut égaler, sinon surpasser, son ami M’Kenzie, et lança dans le public quatre ou cinq diatribes, ou tirades d’invectives, qui étaient, ou qui furent réputés des libelles, contre le lieutenant-gouverneur, contre le solliciteur-général, contre des membres de l’assemblée, contre les jurés, grands et petits, et même contre son voisin et confrère, l’éditeur de l’Observer ; et le procureur-général (Robinson), à qui il n’avait pas pensé, de lancer à la fois contre lui quatre actes d’accusation. Le récit de ce qui s’en suivit serait moins historique que dramatique, ou anecdotique[1].

  1. À la cour, F. Collins, d’accusé qu’il était, devient accusateur : en entamant l’histoire du désastre de W. L. M’Kenzie, il accuse le procureur-général, M. Robinson, de partialité, &c. M. Robinson veut l’interrompre ; mais le juge Willis (nouvellement arrivé d’Angleterre), que son récit intéresse vivement, lui dit de continuer, et il continue à inculper le procureur-général, qui par esprit de vengeance « le poursuit pour de prétendus délits, tandis qu’il a laissé en paix de violents infracteurs de la paix ». Ces délinquans avaient été condamnés à des dédommagemens ; mais ce qui fâchait surtout le sieur Collins, c’est qu’il n’avaient pas été punis, le montant en ayant été mendié pour eux dans la ville. Le juge lui dit d’aller porter plainte devant les grands-jurés, et réprimande sévèrement le procureur-général, « qui a manqué à son devoir », prévariqué, « en ne poursuivant pas les coupables dont M. Collins vient de parler » et M. Robinson de répondre, « qu’il connaît son devoir ; que son habitude n’est pas de poursuivre quand il n’y a pas de plainte devant lui ; « qu’il ne se croit pas obligé de courir le pays pour découvrir des infractions à la paix publique, et chercher des témoins » ; — mais ici « les coupables lui étaient connus ; il devait les poursuivre, ou obliger M. M’Kenzie à les poursuivre criminellement », et le procureur-général de répliquer, et l’altercation de continuer, à la surprise de l’audience, mais à la joie de F. Collins, qui est resté, et qui a autre chose à dire. Il se rappelle qu’il y a dix ou onze ans, il y a eu un duel à York, et qu’un des champions (M. Ridout) a été tué. L’autre champion avait été jugé comme coupable d’homicide simple (manslaughter), et acquitté. N’importe ; F. Collins prétend que les seconds sont des meurtriers, et veut qu’ils soient jugés comme tels. Quoiqu’il s’avoue implicitement et explicitement mu par l’esprit de vengeance, le juge n’en semble pas moins le regarder