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il y a la France, la Russie, l’Angleterre, l’Autriche, la Prusse, sans parler de l’Espagne et de la Turquie, qu’on dirait n’exister plus que de nom. Leur crainte mutuelle, leur intérêt commun est la sauvegarde des petites puissances. L’Europe est si fortement constituée depuis le traité de Westphalie, que Napoléon lui-même, qui était sans doute l’ennemi de l’équilibre, puisqu’il rêvait la monarchie universelle, n’a pu faire disparaître perpétuellement même le plus petit royaume. Voilà un effet salutaire et merveilleux de la balance européenne ; — salutaire, puisque personne ne peut prendre plaisir à ces bouleversemens qui tourmentent les peuples sous les Tamerlan, les Genghis Khan et les Thamas Koulikhan, — bouleversemens qui ne peuvent plus arriver. Sans doute la guerre sera toujours ; mais le peuple vaincu perdra tout au plus une lisière de terrain et paiera les frais de guerre, parce qu’il trouvera des médiateurs et que le droit commun de l’Europe s’oppose à la conquête. La disparition d’une grande puissance est encore non seulement plus difficile à effectuer, mais elle serait plus à craindre pour tous. Ainsi, après Waterloo, les petits esprits de l’Allemagne ne rêvaient que la partition de la France ; mais les esprits dont la portée était au niveau des circonstances extraordinaires de l’époque, — les triumvirs Wellington-Castlereagh, Alexandre et Metternich — comprenaient aussi bien que M. de Talleyrand,