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SATIRE III.

CONTRE LA PARESSE. — (1818)


 : D’un ton grave et hardi, débutai-je pour rire ?
Non, ce fut tout de bon que je promis d’écrire.
Sans trop soigner mon style, ou rechercher mes mots,
J’effraierai les méchants, et me rirai des sots ;
Je poursuivrai partout le vice et la folie :
À ce noble dessein ma parole me lie.
L’on dira : « D’où vient donc un silence si long,[1]
« Après un si grand bruit, un repos si profond ?
« Fi du poète qui si longtems se repose. »
Lecteur, de ce repos veux-tu savoir la cause ?
Depuis cinq ou six mois, je cherche maint sujet,
Où je puisse exercer ma verve, vain projet :
La Paresse[2] irritée affaiblit mon langage,
Ralentit mon ardeur, amollit mon courage,
Épanche la langueur sur chacun de mes sens :
Pour la vaincre, je fais des efforts impuissans :
Contre elle vainement je cherche à tenir ferme :
De son pouvoir sur moi je ne puis voir le terme.
Oh ! quand de ce combat sortirai-je vainqueur ?
Quand reprendrai-je, enfin, ma force et ma vigueur ?

  1. Cette pièce ne fut publiée dans l’Aurore que six mois après la précédente.
  2. On voit que la paresse est ici personnifiée, comme elle l’est partout où j’emploie un P capital.