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IV

Charles et Juliette eurent, chacun de leur côté, la même insomnie ; vers le matin, le même sommeil agité de mauvais rêves, le même réveil inquiet et pénible. Ils ne cherchèrent pas à se voir. Charles sortit ; Juliette s’habilla pour recevoir M. Stéphen, fut recherchée, presque coquette dans sa toilette, et vint attendre au salon.

Vers deux heures, on sonna. Quelle fut la surprise de madame de Villers en voyant rentrer son mari ! Charles, accablé d’inquiétudes, mécontent de sa femme, plus mécontent de lui peut-être encore, avait erré comme une âme en peine et revenait chez lui sans savoir, comme il serait allé ailleurs.

— Pardon, madame, dit-il, je ne vous savais pas ici. Juliette ne répondit rien ; Charles s’assit à l’extrémité du salon et tous les deux se prirent à méditer.

Voyant que son mari ne songe plus à sortir, Juliette cependant commence à s’inquiéter. M. Stéphen ne peut tarder ; que dira Charles de cette visite ? comment l’expliquera-t-on ? À mesure que l’heure s’avance, la jeune femme est plus agitée ; elle se répète en vain qu’elle est libre, qu’il lui importe peu que son mari trouve bien ou mal des actes dans lesquels sa conscience ne lui reproche rien, elle ne peut vaincre son trouble. À trois heures enfin, le timbre de la porte d’entrée la frappe au cœur, elle sent que ses forces l’abandonnent ; mais honteuse tout à coup de sa faiblesse, elle se relève prête à la lutte.